Accueil MONDE Grèce : les jeunes électeurs du Syriza se sentent trahis par «Alexis»

Grèce : les jeunes électeurs du Syriza se sentent trahis par «Alexis»

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Ils avaient largement voté pour la gauche radicale, lors des dernières législatives de janvier, dans l’espoir d’en finir avec l’austérité et de faire le ménage en Grèce. Mais les jeunes risquent de manquer à l’appel lors du scrutin de dimanche pour Alexis Tsipras et son Syriza. A Exarchia, quartier bohème d’Athènes fréquenté par les étudiants et les anarchistes, toute référence à l’ex-Premier ministre est assortie soit d’un soupir de résignation, soit d’une insulte. Privés de perspective d’emploi — la moitié des moins de 25 ans sont au chômage–, mis au régime sec par des parents paupérisés, les jeunes ont été particulièrement frappés par la crise économique qui touche le pays depuis cinq ans.

Cette « génération perdue » comme on l’appelle en Grèce, ne pouvait qu’être séduite par la promesse du Syriza de résister aux créanciers et de mettre fin à leur tutelle d »austérité. D’autant qu’avec des cadres sans cravates, en rupture de traditionalisme, et un Premier ministre benjamin de la vie politique, élu à 40 ans, Syriza incarnait une nouvelle façon de gouverner. Mais en juillet, retournement de situation, le dirigeant doit se plier aux exigences de rigueur et de réformes de l’UE et du FMI en échange d’un nouveau prêt international de 86 milliards d’euros. Lâché par une partie de ses députés, il démissionne en août pour tenter de retrouver majorité parlementaire et légitimité.
Difficile de trouver à Exarchia, où tags et graffitis contestataires recouvrent les murs, quelqu’un prêt à revoter pour lui. « Alexis nous a trahis », s’exclame Spiros, 25 ans, étudiant en art dramatique, approuvé par ses amis qui l’entourent au café.

« Faillite »
Déçu mais pas convaincu non plus par les autres partis, ce groupe envisage l’abstention. « J’ai voté pour un gouvernement de gauche. Je voulais qu’on reste en Europe, mais dans une Europe avec des bonnes règles », estime Alex, 30 ans. « Syriza a fait tout ce qu’il avait dit qu’il ne ferait pas », ajoute-t-il. Le dépit des jeunes a miné le parti lui-même: la direction de son mouvement de Jeunesse a annoncé fin août ne plus soutenir Alexis Tsipras pour les prochaines élections, la majorité de ses membres dénonçant une « faillite » politique dans une motion. Un sondage publié il y a deux semaines par le journal Ethnos ne créditait le Syriza que de 18,6% des voix des 18-34 ans, contre plus de 30% des votes de ce même groupe d’âge recueilli en janvier. « Syriza a perdu son image de jeunesse, d’espoir et de changement, c’est rare en Europe de voir une telle dégringolade en si peu de temps », analyse Manos Papazoglou, professeur de Sciences Politiques à l’Université du Péloponnèse. Lors d’un des premiers meetings de campagne d’Alexis Tsipras à Athènes, la semaine dernière, les jeunes ne se pressaient pas. Antonios Kaisaris, 19 ans, a fait quand même le déplacement, comme une douzaine de membres de la Jeunesse du parti. « Ce gouvernement a besoin de plus de temps pour montrer ce qu’il peut faire », soutient-il, et « nous allons continuer le combat », pour peser sur la renégociation de la dette du pays, promise par le parti s’il est réélu.

« Au moins Tsipras n’a pas volé »
« Nous ne voulons pas du retour de la droite. Ce n’est pas parce qu’on a perdu une bataille, qu’on a perdu la guerre », ajoute-t-il. « Des changements significtifs peuvent survenir » d’ici au vote, estime Manos Papazoglou. Un sursaut de la jeunesse n’est ainsi pas exclu face à la montée dont la droite de la Nouvelle Démocratie est créditée par les tous les sondages, qui la placent à quelques dixièmes de point au plus de Syriza.
Pour beaucoup des jeunes qui voteront finalement Syriza, il s’agit surtout d’un choix par défaut. La Nouvelle Démocratie et le Pasok (socialistes) ont dominé la scène politique grecque depuis quarante ans, et l’arrivée du Syriza a été perçue comme une rupture avec l’ancienne élite, jugée corrompue et incapable. Les anciens gouvernements « sont responsables de ce que nous subissons maintenant », accuse Haris, un professeur d’allemand qui compte voter de nouveau pour Syriza. « Au moins Tsipras n’a pas volé un seul euro au peuple grec », s’exclame-t-il.

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