Il y a un an, la ville de Tanta était frappée par un attentat du groupe Etat islamique (EI). Mardi, malgré une campagne du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi axée sur la sécurité, les électeurs étaient rares dans les bureaux de vote. «Le nombre de personnes ayant voté depuis le début lundi de l’élection est de 792 sur un total de 3.407 électeurs inscrits», indique en milieu de journée Wael Mannaa, le magistrat chargé de superviser l’élection présidentielle dans l’un des bureaux de cette ville du Delta du Nil, dans le nord de l’Egypte. Dans un autre bureau, selon le juge Mahmoud Chetat, ce sont «environ 800 sur 4.000 inscrits» qui ont voté. Dans les deux cas, la participation se situe autour des 20% au deuxième jour du scrutin qui doit se poursuivre sur trois jours. Aucun chiffre officiel n’avait été publié sur le plan national mardi soir. Archi-favori, le président Sissi a pour seul adversaire Moussa Mostafa Moussa, l’un de ses partisans affichés. Les concurrents sérieux du président ont été emprisonnés ou découragés, faisant du taux de participation l’unique enjeu de ce scrutin. Dans les rues de Tanta, couvertes de bannières électorales, une voiture diffuse des chansons patriotiques. Mais, dans cette élection jouée d’avance, les habitants vaquent à leurs occupations habituelles désertant les bureaux de vote. «Nous votons pour remplir notre devoir national même si la victoire de Sissi est garantie», confirme à l’AFP Mahmoud Abdel Hafiz, un retraité après avoir déposé son bulletin de vote dans l’urne. Dans trois bureaux de vote autour de l’église Mar Girgis, où 28 personnes avaient péri dans un attentat suicide de l’EI le 9 avril 2017, seuls un ou deux électeurs viennent déposer leur bulletin dans l’urne toutes les dix minutes environ. Parmi eux, les jeunes sont rares. «Je boycotte cette élection car je considère ça comme une mise en scène», déclare Mohamed Ahmed, un étudiant en médecine de 21 ans, installé dans un café sur une place de la ville.
«Rester positifs»
«Dès qu’une personne a essayé de se présenter contre Sissi, une affaire a été montée contre lui pour pouvoir l’emprisonner, puis Moussa Mostafa Moussa est apparu au dernier moment. C’est une mise en scène», répète-t-il. Selon lui, un taux important de participation consisterait seulement à légitimer l’élection de M. Sissi. «J’aurais voté pour Sissi s’il y avait eu une réelle compétition», confie son ami Alaa Mohammed qui regrette «l’intransigeance» du pouvoir contre les opposants. «Le manque de liberté d’opinion et de concurrence réelle est ce qui m’a dissuadé de participer», assure-t-il. Faouzia Fahim, une octogénaire chrétienne semble plus motivée: «j’étais déterminée à participer parce que sans lui (M. Sissi), les Frères musulmans et les terroristes auraient réduit le pays en poussière», dit-elle, en référence à la confrérie qui est aujourd’hui interdite. Comme au Caire, seuls les partisans du président Sissi montrent leur intérêt pour l’élection à Tanta. Autour de l’église Mar Girgis, un groupe de jeunes arborent sur leur tee-shirts blancs le slogan «Vive l’Egypte» cher à M. Sissi. «Allez voter!», scandent-ils en parcourant les rues. «Nous devons participer et rester positifs», lance Hanaa Mohammed Al Goubaili, une employée de 48 ans mariée à un officier de l’armée. L’attentat de Tanta de 2017 avait été revendiqué par l’EI comme celui commis le même jour dans une église d’Alexandrie (nord). Au total: 45 morts en pleine célébration du dimanche des Rameaux. Ces attaques avaient conduit le président Sissi, élu en 2014 et qui dirige depuis l’Egypte d’une main de fer, à décréter l’état d’urgence dans le pays.