À la fin du printemps 2024, des manifestations étudiantes ont secoué les universités américaines, démarrant à l’Université de Columbia à New York, en avril. Ce mouvement s’est rapidement étendu à d’autres établissements à travers le pays.
Le 18 avril, la présidente de l’Université de Columbia, Naïma Shafiq, d’origine égyptienne, a autorisé les forces de sécurité à envahir le campus et à arrêter plusieurs étudiants. Cet événement a marqué une rupture, avec plus de 100 manifestants pro-palestiniens arrêtés après un sit-in à Columbia Green, une action qui a inspiré des camps de protestation similaires dans d’autres universités du pays. Ces événements ont poussé les écoles à se retrouver face à la difficile question de l’équilibre entre la liberté d’expression et la sécurité du campus. De plus, plusieurs étudiants militants, dont Israa, la fille de la députée musulmane Ilhan Omar, ont été expulsés de l’université. Cette répression a mis le feu aux poudres, et la mobilisation a pris de l’ampleur, englobant des universités telles que New York, Yale, Harvard, New School, Boston, Rutgers, Michigan, Maryland, Taft, North Carolina, MIT, et bien d’autres. La contestation était alimentée par des slogans appelant au boycott des universités israéliennes, à des sanctions contre ceux qui collaborent avec Israël, et à la mise en œuvre du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions). Les étudiants ont exprimé leur solidarité avec la Palestine en brandissant des drapeaux palestiniens et des photos de victimes de Gaza, en particulier des enfants. Cette dynamique a incité des groupes de pression pro-israéliens et des partisans du sionisme à agir rapidement pour étouffer les protestations, redoutant qu’elles ne deviennent incontrôlables. Le slogan « De la rivière à la mer, la Palestine sera libre » a été particulièrement controversé, étant interprété par certains comme un rejet pur et simple de l’existence d’Israël. Les protestations ont continué de croître tout au long du printemps, avec environ 3000 événements jusqu’en juin 2024. Les arrestations ont d’abord été nombreuses, mais la plupart des étudiants ont été libérés rapidement.
Les universités ont renforcé la présence policière pour empêcher d’autres manifestations. Les confrontations ont été relativement rares, sauf à l’Université de Californie à Los Angeles, où des blessures ont été signalées. À la rentrée universitaire de l’automne, bien que les manifestations aient diminué, le nombre de rassemblements est resté important, atteignant environ 950 événements, avec une cinquantaine de personnes arrêtées. Les universités, notamment après l’été, ont mis en place des règlements stricts pour empêcher les manifestations. À Harvard, par exemple, plusieurs étudiants et membres du corps professoral ont été interdits d’accès aux bibliothèques après avoir organisé des sit-ins silencieux contre la guerre à Gaza. À l’Université d’Indiana, certains étudiants ont été sanctionnés pour avoir participé à des veillées aux chandelles après 23 heures, conformément à de nouvelles restrictions sur les activités exprimant des opinions politiques. D’autres établissements, comme l’Université de Pennsylvanie, ont ordonné à des manifestants de quitter les lieux faute d’avoir respecté les nouvelles règles sur les réservations. Le climat politique s’est tendu davantage après l’élection de Donald Trump, qui a entouré son administration de figures pro-israéliennes.
Dès janvier dernier, cinq jours après son investiture, Trump a signé un décret exécutif menaçant d’expulser les étudiants et professeurs étrangers impliqués dans des activités anti-israéliennes. Le décret stipule que toute personne soutenant des activités contre Israël pourrait se voir interdire de séjour aux États-Unis. Le 8 mars, une vague d’arrestations et de déportations a commencé, avec l’arrestation de Mahmoud Khalil, un étudiant palestinien à l’Université de Columbia, à la suite d’une perquisition de son domicile par l’agence des douanes et de la protection des frontières des États-Unis. Mahmoud, un leader des manifestations étudiantes, avait plaidé pour que l’université retire ses investissements d’Israël et avait souvent pris la parole lors des rassemblements.
Il a été déporté après la saisie de sa carte de résident permanent. Les arrestations se sont poursuivies avec la capture de centaines de manifestants, dont des étudiants de l’Université de Columbia, qui ont occupé la tour Trump à New York pour exiger la libération de Khalil. D’autres arrestations ont suivi, comme celle de la doctorante turque Remisea Ozterk, détenue à l’Université de Tufts, ou de la chercheuse Helia Dotagi, expulsée de l’Université de Yale pour ses activités de soutien à la Palestine. La pression sur les opposants à la politique israélienne a atteint son apogée, avec des expulsions et des interdictions de visa visant des universitaires, dont Rasha Alawiya, une médecin libanaise, malgré la validité de son visa. Alors que l’année universitaire se poursuit, de plus en plus d’universités renforcent leurs politiques pour limiter les manifestations. La répression des étudiants et des universitaires pro-palestiniens se poursuit, suscitée par la crainte des autorités américaines de voir la contestation se transformer en une menace plus large pour l’ordre politique.
M. Seghilani
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