En l’absence de textes et de législations en matière d’encadrement du marché des compléments alimentaires, moins encadrés, si ce n’est quasiment non encadrés, que celui du médicament, les compléments alimentaires envahissent les étalages de nos pharmacies, supérettes et même les grandes surfaces et les spots publicitaires sur leurs « bienfaits » crèvent nos écrans, loin de tout contrôle et règlementation.
Situation qui semble ne pas être une source d’inquiétude des pouvoirs publics et des secteurs concernés, dont le commerce, les professionnels médicaux et pharmaceutiques, au regard de l’envahissement de ces produits, souvent porteurs de risques majeurs sur la santé du citoyen et une menace pour la sécurité sanitaire du pays. Étant un marché lucratif, les compléments alimentaires sont présentés et exposés aux consommateurs comme la solution miracle, du plus petit bobo à une maladie chronique, telle, l’hypertension et autres. Au moment ou ailleurs, des sociétés commencent à prendre du recul par rapport à la prise des compléments alimentaires, au profit d’une alimentation saine et équilibrée, pour prévenir contre les maladies et les carences en matière de fer, magnésium, calcium, etc. dans l’organisme, chez nous on assiste à l’explosion de leur commercialisation, sans se pencher sur leurs risques sur non seulement la santé du citoyen mais également la sécurité sanitaire dans notre pays.
Il est plus qu’urgent pour les autorités du pays, notamment les décideurs, de prendre le marché des aliments alimentaires en extension vertigineuse, chez nous, sur la liste de ses priorités, car il y va non seulement de la lutte contre une publicité mensongère, à l’exemple du spot publicitaire vantant la préservation, voire même l’augmentation des capacités de la mémoire, lancé non sans un pur hasard, sur nos chaines de télévisions, la veille des examens du baccalauréat et du BEM. On serait tenté de déduire que ce produit soignerait les malades d’alzheimer atténuerait ainsi les souffrances de leurs proches. Les risques en question étant inquiétants, au regard de la ruée des citoyens vers ces aliments alimentaires, pensant, pouvoir, en finir avec les problèmes d’obésité, des maux de têtes et de dos, de l’hypertension, du diabète, ect… Les compléments alimentaires, qui laissent la science sceptique, s’incrustent dans nos mœurs de consommation, tantôt comme des médicaments et tantôt comme additifs alimentaires, alors qu’il faut consulter pour pouvoir se soigner et adopter une alimentation saine, en légumes et fruits, soit une hygiène de vie, pour éviter toute carence dans notre organisme. Ce n’est nullement par un simple passage à la superette et l’achat, comme on achète un tube de dentifrice, pour prévenir les caries dentaires, d’un complément alimentaire que la douleur au cœur, au dos, au côlon et autres disparaitra, comme suggèrent les spots publicitaires. Sur instruction, du ministère du commerce, le 25 février dernier, à ses neuf directeurs régionaux et 48 directeurs de wilayas, il leur ait demandé « de procéder sans délai, au refus d’admission de ces produits (compléments alimentaires : commercialisés sous les marques « BIO-HERBS Miel » et « MESK AL AYMAN »,Ndlr) sur le territoire national ainsi que leur « retrait immédiat du marché » lit-on dans l’instruction du ministère du Commerce. Il est à rappeler que cette instruction est en réponse à une alerte adressée au ministère du Commerce, par le commandement de la Gendarmerie nationale, dans laquelle il est fait état de la découverte dans les compléments alimentaires des marques commerciales précitées, de principes actifs pharmaceutiques non déclarés , à savoir le Sildénafil et Tadafil, prescrits dans le traitement de l’impuissance ayant des effets secondaires néfastes, tels l’hypotension, la vasodilatation et les troubles de voies urinaires.
«Les gens devraient plutôt chercher à obtenir leurs nutriments à partir d’une alimentation bénéfique»
Pour le Pr Erin Michos, auteur de l’étude et professeur de médecine à l’université Johns Hopkins (États-Unis), il affirme que « rien n’indique que ces produits protègent des maladies cardiovasculaires (infarctus, AVC, maladies coronariennes…) ou du risque de décès et que la panacée ou le remède universel que les gens recherchent n’est pas là (allusion aux compléments alimentaires : Ndlr)». Pour lui, « les gens devraient plutôt chercher à obtenir leurs nutriments à partir d’une alimentation bénéfique pour le cœur, parce que les données montrent que la majorité des adultes en bonne santé n’a pas besoin de prendre de compléments alimentaires» a-t-il précisé, invitant tout citoyen à adopter une hygiène de vie et de consulter le docteur si un problème de santé se manifeste et suivre les consignes de son médecin. Aussi, juillet dernier, les médias audiovisuels ont été sommés par l’Autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV), dans un communiqué « d’interrompre immédiatement », les campagnes publicitaires destinées à promouvoir les produits pharmaceutiques et les compléments alimentaires, lesquelles « requièrent des autorisations de la part d’autorités scientifiques compétentes ». Une note qui ne semble pas avoir mis une fin à la promotion de vente de produits relatifs aux compléments alimentaires, que des médecins et des spécialistes avertissent sur les allégations thérapeutiques trompeuses et une communication « mensongères ». Condamnant ces campagnes publicitaires « mensongères », L’Arav a adressé un avertissement à tous les médias audiovisuels qui diffusent ce type de spots, affirmant que pour « faire la promotion ou la publicité de ces produits, il faut disposer d’autorisations émises par les autorités scientifiques compétentes, conformément au protocole de soins, ainsi qu’au protocole d’exploitation défini par des conseils scientifiques agréés » est-il souligné. Avertissant que ce genre de publicité « représente un danger pour la santé publique et une violation de la loi et de l’éthique professionnelle médiatique et médicale » (..) l’Arav a manifesté ses inquiétudes sur les informations et données, qu’elles qualifie d’« erronées véhiculées par ces campagnes qui vantent des vertus illusoires » sur les compléments alimentaires. Pis encore, les citoyens sont criblés par ces spots publicitaires, à longueur de journée, par les chaînes de TV, pour acquérir des aliments alimentaires, en impliquant, comme souligné dans le communiqué de l’Arav « des médecins et des spécialistes et en exploitant des enfants dans ces publicités mensongères qui ne respectent point les standards scientifiques, ni les règles juridiques et éthiques de la publicité, mettant ainsi la santé des consommateurs en danger » a averti l’Arav. Ne manquant pas l’opportunité ou l’occasion pour tabler sur les ventes, le contenu de ces spots change selon la situation, comme ce fut le cas, à la veille des examens du Bac et du BEM, invitant les candidats à fortifier les capacités de la mémoire ou éloigner la fatigue, par une simple prise d’un complément alimentaire. Certains ont même été jusqu’à proposer des produits, pour éviter de succomber au Coronavirus, alors qu’à travers le monde et notamment chez nous, il est question de respect des gestes barrières, se laver les mains avec du savon plusieurs fois ou le gel hydroalcoolique et le port du masque.
Karima Bennour