Au moins cinq manifestants pro-démocratie ont été tués lundi en Birmanie au lendemain d’une journée de répression meurtrière de la junte qui a bloqué des réseaux de données mobiles, empêchant une comparution en vidéoconférence de l’ex-dirigeante Aung San Suu Kyi.
Deux hommes et une femme ont été abattus et seize personnes blessées à Myingyan (centre), a indiqué à l’AFP un habitant sous couvert d’anonymat par peur des représailles. A 300 kilomètres au sud, deux protestataires sont décédés après avoir reçu un tir mortel à la tête et à la poitrine, selon un autre témoin.
Le bilan ne cesse de s’alourdir avec au moins 44 civils tués dimanche, journée de répression la plus sanglante depuis le coup d’Etat militaire du 1er février. Au total, plus de 120 personnes sont décédées ces six dernières semaines, d’après l’Association d’assistance aux prisonniers politiques (AAPP).
La tension a été particulièrement forte dimanche à Hlaing Tharyar, une banlieue industrielle de Rangoun, où des assaillants ont incendié plusieurs usines chinoises et 22 protestataires ont été abattus par les forces de l’ordre.
La Chine s’est dite lundi « très préoccupée » pour la sécurité de ses citoyens en Birmanie, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Zhao Lijian exhortant les autorités birmanes à prendre des mesures pour « éviter résolument que de tels incidents ne se reproduisent ».
La riposte de l’armée se poursuit sur le terrain judiciaire: l’AAPP recense désormais plus de 2 000 arrestations dont Aung San Suu Kyi, 75 ans, toujours tenue au secret. L’ancienne cheffe de facto du gouvernement civil devait comparaître en vidéoconférence dans la matinée, mais l’audience a du être reportée faute de connexion internet, a indiqué à l’AFP son avocat Khin Maung Zaw.
Elle se tiendra le 24 mars. La prix Nobel de la paix 1991 est poursuivie pour au moins quatre chefs d’accusation: importation illégale de talkies-walkies, non respect des restrictions liées au coronavirus, violation d’une loi sur les télécommunications et incitation aux troubles publics.
L’armée l’accuse aussi de corruption en affirmant qu’elle a perçu 600 000 dollars et plus de 11 kilos d’or de pots-de-vin. Après six semaines de rassemblements pro-démocratie, les généraux poursuivent sans relâche leur répression.
Meurtres, persécutions, disparitions forcées, tortures: le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a dénoncé de probables « crimes contre l »humanité » commis par la junte.