Le bateau-taxi d’Alger est devenu, depuis son inauguration récente, la direction préférée des milliers d’Algériens, venus des quatre coins du pays, par simple désir de découverte où par manque de moyens de distraction. «Le bateau-taxi», attire plus de 2 500 passagers, quotidiennement, leur offrant une tournée agréable à un prix très bas (50 DA), alors qu’elle leur coûtera plus de 1 000 DA, dans un petit navire loué pour 10 ou 15 minutes au niveau des plages de Sidi-Fredj où celles de Aïn-Bénian. Ainsi, les usagers peuvent se déplacer entre les côtes d’Alger en un laps de temps évalué à 30 minutes, tout en respirant de l’air frais et en contemplant la mer et les paysages magiques d’Alger la Blanche. Malgré les lacunes d’organisation et de pression, la plupart n’ont pas regretté le déplacement. Des chaînes et des bousculades pour monter à bord du bateau Au niveau du quai de la Pêcherie d’Alger, on constate une chaîne des voyageurs devant le guichet pour payer leurs tickets, car le nombre des billets vendus ne doit pas dépasser les 340 pour chaque navette. Ainsi, les retardataires doivent patienter jusqu’à ce que la prochaine navette soit lancée. C’est pourquoi un climat de tension et de pression s’installe parmi les acheteurs, qui veulent garantir leurs places. Ici, l’anarchie prend le dessus quand le bateau apparaît, et les gens commencent à bouillonner, chacun des passagers essaie de passer en premier pour prendre place sur la terrasse, et se focalise sur le meilleur moyen pour monter à bord du bateau. Des centaines de personnes attendent ce moment avec impatience, simplement pour pouvoir emprunter le bateau-taxi et tenter l’aventure, alors que des bousculades, rixes et cris, caractérisent ce moment, où le petit pont du bateau devient subitement la cible de tout le monde. L’équipe italienne semble être accoutumée aux bousculades des Algériens, les agents italiens sourient et reçoivent la foule… Les plus grandes victimes de ces scènes sont les enfants, qui pleurent pour essayer de s’échapper, car ils se trouvent souvent écrasés entre la foule. Après un véritable parcours de combattant, sous la canicule de ces jours-ci, les passagers, dont le nombre est limité, arrivent à monter à bord, pour ensuite chercher des sièges libres et s’asseoir tranquillement sur la terrasse, qui est d’ailleurs petite pour le nombre des voyageurs. Le marché noir fait son entrée D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle de jeunes gens ont trouvé champ libre pour se faire de l’argent facile, en achetant des tickets à 50 DA pour les revendre ensuite à des tarifs excessifs. Devant l’affluence importante des voyageurs, la bousculade et les disputes verbales entre les citoyens sont souvent présentes, la majorité d’entre eux veulent gagner la terrasse du bateau pour pouvoir contempler le paysage, la mer, et respirer de l’air frais. Certains jeunes ont saisi l’occasion de la forte demande sur les tickets pour doubler et même tripler leurs prix, selon la volonté du client et ses moyens, ainsi, le ticket qui coûte 50 DA chez le guichetier et facilement revendu à 100 et même 150 DA. Certains voyageurs préfèrent obtenir le ticket facilement sans prendre la peine de faire la chaîne, à l’instar de Houssem, accompagné de sa petite sœur, qui nous a avoué avoir acheté son deuxième ticket à 300 DA, il trouve que c’est exagéré mais il ne pouvait pas laisser sa petite sœur âgée de 10 ans se faire bousculée dans cette foule de demandeurs de tickets. Il a indiqué qu’il est nécessaire de trouver une solution et mieux organiser l’opération de vente pour éviter aux gens ce type de problèmes. Plus intéressant encore, on a croisé un jeune homme venu de Djelfa, qui a vendu ses tickets à 100 DA chacun, il dira à ce propos «je possédais deux tickets, une femme est venue me proposer de me les acheter à 200 DA alors j’ai accepté avec joie». Malgré les lacunes d’organisation, certains voyageurs s’estiment chanceux Malgré l’insuffisance de sécurité et le manque d’organisation ayant caractérisé les navettes effectuées jusqu’à présent par le bateau-taxi, la plupart des voyageurs approchés ont affirmé leur joie et enchantement d’avoir réalisé un rêve tant attendu d’être montés a bord du bateau-taxi, a l’instar de Mohamed venu du Sud algérien, âgé de 23 ans, qui n’est jamais monté dans un bateau, «pour moi c’est un rêve qui se réalise», il a également indiqué que «grâce aux tarifs symboliques appliqués, tout le monde peut le faire». Il est a signaler que la plupart des gens rencontrés ont considéré ce bateau comme un «moyen de tourisme» et non pas un «moyen de transport», de nombreuses familles, accompagnées de leurs enfants, ont préparé leur déjeuner et boissons dans des glacières pour manger a bord du bateau, et qu’a ce titre, une mère la quarantaine, accompagnée de ces deux enfants affirme avoir pris beaucoup de plaisir, «on a pris des photos, on a mangé et rigolé, je trouve que ce bateau est un moyen de transport très original». Certes, ce type de transport est nouveau en Algérie, c’est même une découverte pour la grande majorité, spécialement ceux venus du sud algérien, et d’autres régions dont nous citerons Batna, Djelfa et Tiaret. Beaucoup d’autres familles ont déclaré que leur direction est la mer qui se trouve juste au terminus du bateau. Raouf, venu avec sa femme et sa fille unique, précise que le bateau facilite le voyage vers la plage, et associe l’utile à l’agréable, précise t-il. Plus de bateaux souhaités Émerveillés par le voyage à bord du navire, les gens ont insisté sur l’importance d’accompagner cette initiative par une meilleure organisation garantissant aux passagers le confort nécessaire dès l’entrée du port jusqu’à l’arrivée à la destination souhaitée. Ils disent qu’il est nécessaire d’acquérir d’autres bateaux pour apaiser la pression actuelle, qui, selon eux, reste la source de tous les problèmes d’organisation et de vol fait aux citoyens. Rappelons dans ce cadre que le ministre des Transports, Amar Ghoul, avait promis de nouvelles dessertes dans un premier temps vers d’autres destinations dans la Capitale, dont nous citerons, Hussein-Dey, Belouizdad, Bordj el-Kiffan et le village côtier de Tamentfoust, pour arriver ensuite vers les wilayas limitrophes, à l’instar de Tipaza et Boumerdès, avant de passer vers Oran et Annaba. Le ministre des Transports précise également que la première phase concernera le transport des personnes, ensuite des personnes et leurs voitures et enfin les personnes, voitures et marchandises. Pour ce faire, le ministre des Transports, Amar Ghoul avait également annoncé que l’ENTMV va acquérir entre 4 à 5 bateaux, afin d’atteindre ces objectifs, et apaiser la pression actuelle. Reste à dire, qu’après tout, dans le navire, l’ambiance est amusante et plusieurs voyageurs approchés ont affirmé que cette initiative est très intéressante et certains d’entre eux, par manque de moyens, ont insisté sur la modestie du tarif «50 DA» qui leur a permis de tenter l’aventure, et que de nombreuses personnes sont venues de Djelfa, Batna, Tiaret et autres. À raison de quatre navettes quotidiennes, dont la durée du voyage est de 30 minutes, le premier départ de la Pêcherie d’Alger est programmé à 8h et le dernier à 18h30, le premier bateau-taxi affrété par l’Entreprise nationale du transport maritime des voyageurs (Entmv) auprès de l’armateur italien Capitaine Morgan, avec 8 000 euros/jour, spécialement pour assurer le transport maritime urbain reliant le port d’Alger à celui d’El-Djamila (Aïn Bénian), à l’Ouest de la Capitale, a permis aux Algériens même les plus démunis d’effectuer un voyage qui restera sans doute gravé dans leurs mémoires. Hassiba Chaïblaïne