Ayant à peine repris leur souffle, les cours du pétrole demeurent otages des enjeux politiques des américains. En effet, alors que ces derniers ont imposé de lourdes sanctions sur l’Iran, les cours du pétrole sont montés légèrement sans effacer leurs pertes hebdomadaires de vendredi en cours d’échanges européens. Ceci intervient au moment où le marché, qui craignait fin avril un déficit de l’offre, s’inquiète désormais d’une surabondance d’or noir. Une surabondance due à la montée des stocks américains qui sont à leur plus haut depuis 2017. Tandis que le marché s’était focalisé fin avril sur l’Iran, puisque Washington avait décidé d’arrêter d’exempter certains importateurs de brut iranien de sanctions dans le but explicite de réduire les exportations de Téhéran à zéro, l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial et rival géopolitique de l’Iran, a annoncé être prête à compenser les pertes en augmentant sa production. Un signe perçu par l’Iran comme étant une menace politique unilatérale pour l’OPEP. En effet, le ministre iranien du Pétrole, Bijan Zanganeh, a déclaré que «l’Iran est membre de l’OPEP uniquement pour protéger ses intérêts, et si certains membres de l’OPEP veulent mettre en danger l’Iran, nous n’hésiterons pas à leur répondre». Plus loin, le ministre iranien a indiqué que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) risque de s’effondrer en raison de « démarches unilatérales » de certains de ses pays membres. «J’ai dit au secrétaire général de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), Mohammad Barkindo, que l’organisation était menacée en raison de démarches unilatérales de certains de ses membres et risque de s’effondrer », a dit M.Zanganeh, à l’issue de son entretien avec M.Barkindo en visite à Téhéran. Il a averti que «si des membres quelconques de l’OPEP proféraient des menaces à l’encontre de l’Iran, celui-ci ne s’y soustrairait pas». «Les pays qui se servent du pétrole comme d’une arme provoqueront l’effondrement de l’OPEP», a affirmé le ministre, toujours selon Shana. La Russie, bien qu’elle ne soit pas membre de l’OPEP, avait elle aussi affirmé qu’elle peut augmenter sa production. Pour rappel, lors de son déplacement à Pékin à l’occasion du Forum sur la Nouvelle route de la soie, le président russe Vladimir Poutine a assuré que son pays pourrait satisfaire la demande de plusieurs pays en pétrole, dont la Chine. Il a également indiqué que le pays avait les capacités d’augmenter sa production : «Nous produisons 11,5 millions de barils par jour. Et nous pouvons produire encore plus». Dans le même temps, il a déclaré que Moscou entendait respecter ses engagements dans le cadre de son accord avec l’OPEP visant à maintenir la production à un certain niveau. Autrement, la Russie pourrait produire plus de pétrole mais, la question qui mérite d’être posée, c’est : qui est le premier bénéficiaire de ces sanctions américaines contre l’Iran ? En effet, qu’est-ce qu’aura à gagner la Russie si elle sera appelée à compenser la production iranienne. Une chose est sûre, le président russe avait espéré que l’Iran puisse continuer à exporter son pétrole, ce qui est témoin d’une certaine entente, pendant que l’Arabie saoudite continue de s’allier avec les États-Unis. L’accord entre les pays de l’OPEP et plusieurs autres producteurs de pétrole, dont la Russie, est entré en vigueur début 2017. En décembre 2018, les pays de l’OPEP se sont mis d’accord pour réduire à partir de l’an prochain (2019) leur production de 2,8% par rapport au niveau du mois d’octobre dernier. Les tensions entre membres de l’OPEP pourraient compliquer la tâche de l’Organisation lors de sa réunion, fin juin, où un renouvellement de l’accord devrait être débattu.
Lamia Boufassa