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Affaire Sonatrach-1 : le gré à gré au cœur du procès

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La défense, la partie civile et le procureur général ont auditionné hier, pour le second jour d’affilée, le premier groupe des accusés présentés devant le tribunal criminel d’Alger dans l’affaire dite « Sonatrach-1 », et impliqués dans le marché relatif au système de contrôle et de surveillance électronique du complexe industriel du Sud, signé entre Sonatrach et le groupe allemand Contel Funkwerk.

Hier, vers les coups de 9h 30 mn, le premier à passer au jeu des questions-réponses était Belkacem Boumediène, l’ex-vice-président chargé des activités amont de Sonatrach. Aussitôt les questions de la partie civile commencent, et en répondant à la question de l’avocat de la partie civile, relative aux raisons qui ont poussé le groupe Sonatrach à choisir l’offre la plus-disante dans les avis d’appels d’offres, l’accusé a affirmé que c’est une question de qualité des services proposés. Il a, de ce fait, fait savoir que le groupe s’est engagé avec le moins-disant, quand la qualité des prestations était identique avec le plus-disant. Par la suite, quand la partie civile avait interrogé l’accusé, quant au contrat conclu de gré à gré avec Contel Funkwerk Plettac pour la réalisation du projet-pilote de sécurisation du Complexe industriel sud (CIS), l’accusé a affiché un sourire narquois, sur ce, le juge, Mohamed Reggad, le rappelle à l’ordre, en lui précisant que l’avocat a le droit de lui poser toutes les questions qu’il veut. Contraint de répondre, l’accusé Belkacem Boumediène a indiqué que le mode de gré à gré dans la passation des marchés avec Contel Funkwerk Plettac n’a guère enfreint la loi, et était réglementaire. Continuant dans le jeu des questions-réponses, le juge Reggad a rappelé aux avocats de la partie civile qu’il s’agissait d’un interrogatoire. S’étalant davantage sur la question du contrat conclu de gré à gré avec Contel Funkwerk Plettac, l’ex-vice-président chargé des activités amont de Sonatrach a rappelé que le mode de gré à gré a été utilisé vu que les avis d’appels d’offres lancés par Sonatrach étaient infructueux. «Sonatrach a lancé plus de 5 000 appels d’offres, mais ces derniers étaient tous infructueux. On n’avait pas le choix que de recourir au mode gré à gré», a insisté le prévenu. Le juge qui a demandé plus de détails, quant à ces avis d’appel d’offres infructueux, est resté sur sa faim. En effet, sur ce, le prévenu a regretté qu’il ne puisse donner des chiffres exacts vu qu’il n’est pas une «banque de données». Au sujet de la signature des contrats, Belkacem Boumediène a indiqué que celui qui signe connaît parfaitement les détails de celui-ci, et c’est pour cela que le règlement de dérogation a été mis en place par l’ancien P-DG de la Sonatrach, Mohamed Meziane.
«Celui qui signe en dehors de ce règlement de dérogation aurait certainement été mis à la porte, ou jeté en prison», dira-t-il. De surcroît, en réponse aux questions de la partie civile, le prévenu a fait savoir qu’au début 2002 Mohamed Meziane avait voulu lancer un avis d’appel d’offres pour l’approvisionnement de l’essence, or, Naftal est une filiale de Sonatrach qui détient le monopole du carburant en Algérie. D’autre part, et pour ce qui est de l’urgence évoquée par Belkacem Boumediene, lors de son audition par le juge, qui avait noté les menaces qui guettaient les installations pétrolières à l’époque, et ce, pour justifier l’urgence qui aurait conduit la direction de Sonatrach à opter pour le mode de gré à gré dans la passation des marchés avec Contel Funkwerk Plettac, hier, le prévenu a nié toute précipitation dans l’octroi du projet, estimant, néanmoins, que l’attentat de Tiguentourine n’a pas eu lieu durant les années 90, et qu’elle démontre que la menace terroriste pèse toujours sur les bases pétrolières algériennes, d’où l’urgence de lancer les marchés de télésurveillance. Il a, en outre, indiqué que le choix de Contel Funkwerk Plettac n’était pas fortuit, bien au contraire, il s’est chargé de mettre en place une commission des offres techniques. Cette commission a été chargée, selon les dires de Belkacem Boumediène, d’étudier les sociétés qui activent dans le domaine de la télésurveillance. Réagissant à la question de l’avocat Abdelmadjid Sellini, relative au fait que Belkacem Boumediène a été nommé par décret présidentiel, et que les décisions doivent venir du président de la République, le juge Mohamed Reggad s’est exclamé, en disant que c’est une grande question qui mérite une grande réponse. Toutefois, Belkacem Boumediène dira que le président de la République l’a chargé de missions précises, mais qu’il n’a pas les prérogatives comme le P-DG. Le juge Reggad, qui a estimé que le prévenu esquive la réponse, lui rappelle qu’il doit répondre clairement et sans faire le malin. Ainsi, Belkacem Boumediène dira qu’il devait appliquer les ordres ! «Je ne peux pas refuser les ordres, je ne suis qu’une personne vulnérable», tentait-il de se rattraper.

Pas de pénalités sur les retards de réalisation des projets
D’autre part, le prévenu a indiqué que Contel Funkwerk Plettac a accusé des retards d’une année dans la réalisation des projets de télésurvaillance, mais sans que des procédures de pénalités ne soient engagées contre le groupe, et pour cause, c’est Sonatrach qui n’a pas respecté les conditions du contrat. Par ailleurs, le juge a interrogé le prévenu si le mode gré à gré a été applicable aux temps de Chakib Khelil seulement, le prévenu a répondu non.

Le procureur dévoile un document inédit
Le procureur de la République a dévoilé, pour sa part, un document inédit. Il s’agit d’une lettre de Siemens dans laquelle la société affirme qu’elle peut parfaitement assurer l’installation de systèmes de télésurveillance pour plus de 123 sites pétroliers à In-Aménas, Hassi -Messaoud, Hassi-R’mel. Néanmoins, dans la lettre, Siemens a exprimé son désarroi quant au manque de professionnalisme de Sonatrach qui a préféré octroyer le marché, selon le mode de gré à gré, au lieu de procéder à une consultation ouverte. À ce sujet, l’accusé a nié qu’il était au courant de celle-ci. Également, l’accusé a rappelé que Chakib Khelil lui a assuré qu’il assumerait la responsabilité. «Le ministre de l’Énergie et des Mines savait-il que les enfants de Mohamed Meziane étaient associés dans Contel Funkwerk Plettac ?», interroge le juge. «Non ! Et moi non plus. Je l’ai appris par le biais des enquêteurs du DRS qui m’ont d’ailleurs chargé d’en informer le ministre lequel m’a assuré qu’il assumerait la responsabilité, s’agissant de l’élaboration de la stratégie de sécurisation des installations et, donc, du projet-pilote», souligne Boumediène.
Lamia Boufassa

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