Ne pas céder à l’euphorie et faire preuve de prudence et d’optimisme. Si l’Algérie «ne peut plus se cacher et redevient bien malgré elle l’un des favoris du tournoi» comme diraient beaucoup d’analystes, une partie de l’opinion n’a pas manqué d’avertir sur les risques d’ «euphorie» sur laquelle s’est sérieusement penché Belmadi en s’attelant à mettre à l’abri ses joueurs. En rappelant les effets bénéfiques du 1er tour et la dynamique qui est née en nous offrant, à l’arrivée, une équipe imposant le respect. Qui fait peur. Une guerre psychologique attendue et un statut de favori qu’il préfère laisser aux autres.
Croire en sa bonne étoile
Meilleure équipe du 1er tour, meilleurs 1er avec le plein de points mais avec une meilleure différence de buts (+ 6, 06 buts inscrits, aucun encaissé), Belmadi meilleur coach, deux joueurs dans l’équipe type (la confirmation Mahrez et la révélation Bennacer), deux autres sur le banc des remplaçants (le chatoyant Belaïli et l’époustouflant Atal), de jeunes pousses qui crèvent l’écran, à l’image de Boudaoui. En tout, et ce n’est pas rien, signe que l’E.N. retrouve et son football et ses sensations (c’est les statistiques, toujours aussi froides mais tellement expressives car elles mentent rarement, qui l’assènent sèchement) a toutes les raisons de croire, cette fois, en sa bonne étoile. Mérite non pas seulement la confiance de ses fans qui ont vite fait de mettre une croix sur le passé avec une dégringolade en règle de ses favoris, mais aussi celle des analystes et observateurs, unanimes désormais à en déceler les prémices d’une future grande sélection. Qui n’a peur de rien et de personne. Capable, comme elle l’a démontré à l’occasion d’un premier tour abouti ou presque et que personne n’attendait à pareille fête, de se mêler aux favoris. D’aborder désormais, tout simplement et sans forfanterie aucune, la suite du tournoi dans le costume de favori. D’Abou Rida, le boss de la fédération égyptienne, aux stars les plus en vue des «Pharaons» pourtant donnés pour successeurs assurés du Cameroun sur le trône africain (pas en raison seulement de la qualité de leur effectif mené par un Moh Salah au rendez-vous, mais d’autres considérations liés aux fameux jeux de coulisses propres aux compétitions continentales et leur poids énorme sur la trajectoire de bien des trophées), à l’expérimenté coach du Maroc, Hervé Renard, qui fait part de son «étonnement» de voir les Algériens se mettre aussi vite en évidence, d’entrée de jeu et mettre d’accord les spécialistes sur leur niveau actuel, en passant par les grands noms, cette impressionnante armada de talents activant dans les grands championnats européens (on citera pêle-mêle, dans le désordre, les Mané, Naby Keita, Pepe, les frères Ayew dignes successeurs de leur père, de grosses pointures du football mondial qui ne courent pas les rues) ainsi que des techniciens avisés à l’instar du tandem néerlandais, Seedorf- Kluivert qui font leurs tout premiers pas dans la très difficile arène africaine et qui savent de quoi ils parlent quand ils abordent la question. Unanimité parfaite sur le bel allant affiché par les «Guerriers du Sahara» qui étonnent plus d’un par leur abattage, leur courage, le cœur mis à l’ouvrage, leur parfaite maîtrise technique, leur discipline tactique, leur fraicheur physique qui feront d’eux, la première partie du tournoi à peine bouclée, une des terreurs, pour ne pas dire le super favori dans ce qui reste de la course au si prisé trophée qui fait, ne le cachons pas, rêver maintenant debout toute l’Algérie.
Ne surtout pas se poser de questions
Éloges ou superlatifs mérités ? Ce qui est sûr (ça cache quoi, au juste ?) c’est que les déclarations, bien intentionnées ou pas, ne manquent pas, chacun allant de son point de vue à l’arrivée de trois sorties qui ont mis du baume au cœur de l’opinion, fait souffler un vent nouveau sur l’Algérie du «Hirak», une mobilisation citoyenne qui fêtait dans l’exception l’évènement historique de l’Indépendance retrouvée un certain 5 juillet de l’An de grâce 1962. Chiffres à l’appui, sans concession, les bilans ont parlé en donnant raison aux ambitions de Belmadi et ses troupes qui rappellent, à qui veut les entendre, qu’ils n’ont pas fait le déplacement du Caire en simples touristes. Tout aussi vrai qu’ils ne se présentaient pas, un rôle et une casquette qu’ils laissent à des cylindrées qui ont déjà fait leurs preuves à ce niveau, comme les Nigeria, Cameroun, Maroc, Ghana, Côte d’Ivoire et, bien sûr, la toute fière Égypte qui veut se convaincre (statut d’organisateur oblige) que la couronne ne quittera pas les bords du Nil qui risque de déborder en cas d’échec (aux pieds des pyramides, on pense sérieusement à ce probable sommet, une affiche qui agite à n’en pas douter les milieux footballistiques de l’Afrique, les retrouvailles algéro-égyptiennes étant, comme l’on sait, frappées, des deux côtés, du sceau de la passion exagérée et du chauvinisme exacerbé, ce qui promet bien des sensations fortes) dans le costume de nouveau N°1 dans une édition où ils sont venus pour se «relancer». Retrouver la «foi» et se remettre de sérieux remous. D’errements en tout genre. Si une bonne partie des chantiers a été menée à bien, la confiance (pas encore le statut de grand du continent, ce dont, à bien des raisons, pour éloigner une pression grandissante sur ses joueurs notamment, l’entraîneur refuse de reconnaître ?) en voie d’être retrouvée, si ce n’est pas déjà fait, les «Fennecs» ne laissent plus personne indifférent et suscitent à nouveau parmi le public, reconnaissant, un certain engouement. Plus fort et en plus de la fierté exprimée au détour des trois victoires acquises avec l’art et la manière (n’en déplaise aux éternels détracteurs et autres philosophes du ballon rond, un engouement certain chez les grands et les moins grands au pays comme ailleurs où «El Khedra», retrouvant de la verve et bien des couleurs, a regagné les cœurs de ses admirateurs. Pas seulement en Algérie mais avec cette impression (conviction même) que les superlatifs qui pleuvent sur elle ne sont pas, alors là pas du tout, dénués d’arrière-pensées à bien lire les propos du très rusé maître tacticien, Herve Renard qui, craignant que l’on s’intéresse d’un peu trop près aux performances de son team (il faut reconnaître que les «Lions de l’Atlas» se sont jusque-là montrés fidèles aux prévisions en développant un jeu de bonne facture et s’imposent peut-être comme le premier concurrent sur la route du sacre pour l’Égypte qu’on présente comme celui à qui la «reine» aurait déjà fixé rendez-vous pour la grande fête du 19 juillet prochain.
C’est qui le vrai favori ?
Dans la foulée des commentaires élogieux de la CAF qui s’interrogeait sur cette Équipe d’Algérie qui a montré bien de belles facettes en «convaincant tout le monde sur son énorme potentiel avec un jeu électrique, un rythme élevé, capable surtout de montrer plus et mieux, n’a pas tout donné.» À laquelle rien ne semble pouvoir arriver. On ne supplante pas le Maroc et l’Égypte pour rien et cette distinction de meilleure équipe de la phase de groupes, si elle fait du bien au mental, donne du crédit au travail accompli au staff technique, à sa tête Belmadi qui vient de remettre sur pied l’équipe en un temps record, en lui (re)donnant, surtout, une âme, et les déclarations aussi nombreuses qu’élogieuses sorties à grand renfort médiatique du camp des favoris justement, si elles titillent l’égo du fan algérien, n’en laisse pas moins de marbre le sélectionneur qui sent là comme une ruse en vue de semer le trouble dans l’esprit des joueurs algériens qu’un trop plein de pression pourrait pousser à perdre de leur concentration actuellement à son maximum comme on a pu le constater lors du passage couronné de succès contre le Sénégal à l’occasion d’un match référence qui a changé bien des choses quant aux chances algériennes de briller dans cette édition. Tout le monde maintenant a les yeux braqués sur la bande à M’Bolhi à laquelle on endosse (presque de force et à des fins inavouées) ce costume lourd à porter de favori pour un onze qui sort à peine d’une longue période de convalescence. Serein et sachant ce qui l’attend et comment il doit faire pour garder l’équilibre d’un groupe finalement en bonne santé (psychologiquement et c’est le plus important dans ce genre de compétitions où le moindre détail vaut son pesant), Belmadi connaît bien la «porte de sortie» du piège tendu en rappelant, chaque fois que possible, qu’il a certes des «ambitions» mais pas au point de revendiquer un rang qu’il a les moyens d’atteindre mais qu’il laisse aux autres. Aux «vrais» favoris. En attendant, et en commençant par la très compliquée sortie contre les redoutables Guinéens, qui plus est dans un match à élimination directe, lui et ses éléments, apparemment «vaccinés» (l’expérience des terrains africains des Mahrez, Feghouli, Guedioura, Halliche, M’Bolhi, Slimani, pour ne citer que les plus anciens, devrait peser dans la balance pour négocier certains virages décisifs) continueront, rappellent-ils en chœur, à «avancer doucement, match par match et sans se mettre de la pression inutile.» En jouant comme ils ont su le faire depuis leur entrée en matière face au Kenya. On peut leur faire confiance.
Par Azouaou Aghilas