Invité, en Algérie, par le Parti des travailleurs (PT) de Louisa Hanoune, Dr Oumar Mariko, leader politique malien, non moins président du Sadi (Solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance), est revenu, en long et en large, sur la situation multiforme prévalant au Mali. À ce titre, il a salué la position algérienne soutenant un règlement pacifique du conflit dans ce pays. En proie à un conflit depuis l’intervention militaire de janvier 2013, de fil en aiguille, celui qui était figure de proue d’un large mouvement estudiantin, ayant organisé des manifestations contre le régime du chef d’État, Moussa Traoré, s’est étalé sur le combat de son parti, d’essence contre toute forme d’impérialisme et d’ingérence des puissances occidentales dans les affaires de son pays, et plus généralement en Afrique. Avant d’entamer sa communication, la patronne du PT a retracé la genèse des relations liant son parti à celui de son hôte, dont elle dit être «consciente que le destin des deux pays est commun, eu égard aux liens historiques inhérents à leur lutte contre le colonialisme pour le recouvrement de leur indépendance», dira-t-elle en guise de déclaration liminaire. En effet, que ce soit sur les questions internes, les lectures du développement de la situation internationale, les deux formations politiques s’inscrivent dans une même vision politique. C’est du moins ce qu’il en ressort des propos des deux responsables politiques. D’emblée, Oumar Mariko, également député au Parlement malien, a tenu à rendre hommage au peuple algérien, avant de saluer peu après la position algérienne privilégiant le règlement pacifique du conflit qui sévit dans le Nord du Mali. Pour lui, ce n’est pas le fait du hasard puisque, de par le passé, l’Algérie a toujours été à l’avant-garde des luttes indépendantistes des peuples. «L’Algérie qui a été au centre de l’occupation colonialiste ayant gagné beaucoup de pays de la région, notamment en Afrique, a de tout temps été du côté des peuples opprimés, tout comme le Mali», dira-t-il fort à ce propos. Le leader de la politique malienne a encensé le rôle joué par l’Algérie dans le règlement du conflit sévissant dans son pays, à travers une politique ayant abouti à la signature de l’Accord de paix entre les différentes parties maliennes. «Le point important de l’Accord réside dans le retour à la paix et la réhabilitation de l’État-nation, et la réhabilitation du débat politique, ce que nous soutenons», a-t-il précisé. En remontant dans l’histoire, Oumar Mariko a rappelé que le premier président du Mali indépendant (1960-1968), Modibo Keïta, a soutenu toutes les Causes justes menées par les peuples pour l’indépendance, en Algérie, en Palestine, au Viêtnam…D’ailleurs, a-t-il précisé, le régime de cet ex-chef d’État panafricaniste et nationaliste convaincu a vite été balayé par le colonialisme français. Le chef du Sadi ne pose aucun doute à affirmer que l’esprit colonialiste d’hier n’a pas changé de celui d’aujourd’hui, en rappelant l’intervention étrangère dans son pays, sous le prétexte fallacieux de lutter contre le terrorisme, a-t-il laissé entendre. «Le colonialisme a essoufflé toutes les vertus insufflées par le défunt président, Keïta, au peuple malien, et a mis en place tout ce qui est rejeté», a-t-il illustré ses propos. Qu’en est-il justement de la situation prévalant lors de la Révolution estudiantine de 1991 ? Pour l’invité du PT, la situation dans son pays était en déliquescence totale, et a touché tous les domaines de la vie, et s’assimile à un désastre politique, économique et social. «Une corruption disproportionnée, un système sanitaire et éducatif en déchéance, un chômage endémique alarmant, une paupérisation grandissante, un exode rural et une émigration en hausse…», telle était l’image frappante de ce pays, a expliqué l’orateur. «Nous avons pensé être un pays indépendant après la Révolution, mais ce n’était pas le cas», a-t-il regretté, avant d’enchaîner avec la situation prévalant actuellement dans ce pays.
«Nous en avons des dictateurs, à nous de nous en occuper»
Le premier responsable du Sadi a tenu à défendre bec et ongles le principe selon lequel la solution à la crise malienne doit découler de l’intérieur du pays. Après l’intervention militaire multinationale dans ce pays, sous l’égide des Nation unies, et le processus de transition démocratique ayant suivi, «de nouveaux riches sont arrivés, et ont pris les commandes du pays sous couvert des instances monétaires internationales que sont le FMI et la Banque mondiale», a-t-il résumé. Les conséquences d’une telle situation conjuguées à une insécurité criante se traduisent, selon Mariko, avec un État qui s’est retiré de la vie publique ayant accentué la crise qui s’est multiplié sous forme d’un développement croissant des fléaux, tels que la drogue, des prises d’otages, notamment au niveau du très convoité Nord du pays. En poursuivant son procès contre le «néocolonialisme impérialiste», l’homme politique a indiqué que l’Occident a remis en cause la notion de l’État-nation, et veut créer à la place des micro-États, afin d’assoir sa politique capitaliste et d’assouvir son appétit vorace des richesses des pays africains. «Le Nord du Mali est riche, mais le peuple est appauvri par une politique de paupérisation qui exclut tout développement dans la région», a-t-il fait savoir. En appelant à la reprise en main des destinées de son pays, le même responsable politique a préconisé une «Armée forte et solidaire» pour retrouver sa souveraineté «perdue» et de réaffirmer le caractère État-nation du Mali. Plus loin encore, pour Mariko, à travers la déstabilisation du Mali, c’est aussi l’Algérie qui en est ciblée par ricochet. Et pour cause, la fragilisation du Mali en particulier et des pays de la région en général, dominés par un climat d’insécurité criant, permettrait, à croire le même responsable, de s’attaquer facilement à l’Algérie, a-t-il prévenu. Même si tout le monde s’accorde à relever ce constat, il n’en demeure pas moins que, pour l’orateur, l’Algérie est l’un des rares pays ayant gardé sa souveraineté. Cette position est, selon lui, un facteur clé pour le règlement des crises, et représente, pour lui, un avantage qu’il faudrait mettre à l’actif des autres pays en proie à de graves dissensions.
Farid Guellil