Dans le rapport de la Banque d’Algérie, sur la situation financière du pays pour 2013, présenté par le directeur de la Banque d’Algérie, hier, aux députés de l’Assemblée nationale, on apprend que le gouvernement a puisé pour «la première fois» dans le Fonds de régulation des recettes (FRR), lequel a été créé en 2000. Le rapport de Mohamed Laksaci estime à 70,2 milliards de dinars (près d’un milliard de dollars) la somme qu’a puisée le gouvernement auprès du FRR, pour financier le déficit budgétaire, évalué à 151,2 milliards de dinars. Il est indiqué dans le rapport de Laksaci que si les «déficits » des années 2009 et 2012 ont été financés «sans le recours» au FRR, «celui de l’année 2013, en revanche, quoique très faible (moins de 1% du PIB) l’a été» par le prélèvement précité, à savoir 70,2 milliards de dinars. Et sur l’évolution monétaire et économique dans le pays, le rapport relève que «les ressources (du FRR, ndlr) représentent une capacité de financement appréciable». Force est de souligner qu’encore une fois nombreux étaient les parlementaires qui ont brillé, hier, par leur absence à la séance consacrée à la lecture du rapport en question, qui intervient, notons-le, au moment où le prix du baril continue sa chute, dont notre économie et les caisses de l’État en dépendent à plus de 95%.
Laksaci avertit sur la chute du prix du pétrole
Dans le cas où le prix de l’or noir continue sa chute, les capacités de l’Algérie à résister risquent de s’épuiser, a averti, hier, le gouverneur de la Banque d’Algérie, lors de la présentation de son rapport sur les évolutions économiques et financières de l’année 2013, et le premier semestre 2014, à l’Assemblée populaire nationale. À moins d’un mois des propos tenus par le ministre des Finances, Djellab, affirmant, début décembre courant, que «l’Algérie est préparée à résister au choc pétrolier», le gouverneur de la Banque d’Algérie a été moins rassurant. Laksaci a averti, hier, sur les conséquences de la poursuite de la dégringolade du prix de l’or noir. Estimée à près de 30%, cette chute a affecté l’économie nationale et les indicateurs ne sont plus au vert. La balance extérieure de paiement, selon le patron de la Banque d’Algérie, au premier semestre de l’année en cours, enregistre un déficit de 1,32 milliard de dollars, contre un excédent «léger» de 0,88 milliard de dollars pour l’année dernière, à la même période. Autre indicateur, dévoilant l’impact de la chute du prix de l’or noir, c’est la décroissance qu’enregistre le montant global des réserves de change. Celles-ci «ont diminué à 193,26 milliards de dollars, fin juin 2014, alors qu’elles avait atteint 194 milliards de dollars, fin 2013». Soulignant que notre pays ne peut «amortir» la baisse du prix du pétrole, le gouverneur de la Banque d’Algérie rappelle par ailleurs, outre qu’il y a «baisse» de la dette extérieure, «l’Algérie dispose de réserves de change à court terme». Sur le Fonds de régulation des recettes, Laksaci a annoncé la mise en place d’un mécanisme pour amoindrir l’effet d’un choc pétrolier, sur la conduite de la politique budgétaire, indiquant que les recettes sont passées de 5 238,80 milliards de dinars, fin 2013, à 4 773,51 milliards de dinars, fin juin 2014. Une baisse expliquée, par celui qui est à la tête de la BA depuis plus de dix ans, par «la forte augmentation des dépenses d’équipement et dépenses courantes», en comparaison à l’année dernière. S’agissant du taux de change moyen du dinar, le rapport fait état «d’une baisse de 4,32% par rapport à l’euro», au premier semestre de l’année 2014, alors qu’il a enregistré une «appréciation de 2,13% par rapport au dollar américain, vers la fin 2013».
Dépenses de l’État…
Le rapport de Laksaci mentionne que les dépenses de l’État ont enregistré une «hausse vertigineuse en cinq ans». Le montant global de ces dépenses s’élevait à 6 092,1 milliards de dinars en 2013, contre 4 246,3 milliards en 2009. Les dépenses de fonctionnement, selon le rapport en question, représentent 67,9% de ce budget, soit 4 204,3 milliards de dinars, contre 2 300 milliards de dinars en 2009, et indiquant qu’en 2013, les salaires des fonctionnaires représentaient 29,9% du budget de fonctionnement de l’État. Les revenus pétroliers de l’Algérie, durant le premier semestre 2014, estimés à 31,8 milliards de dollars, une baisse en comparaison de ces revenus, estimés à 32,3 millions, durant la même période, en 2013. Créé en 2000, le Fonds de régulation des recettes (FRR) est alimenté par les différences entre le prix du pétrole, vendu sur le marché, et le prix de référence (37 dollars le baril) retenu par la loi de Finances. En 2013, le FRR s’établissait à 5 643,2 milliards de dinars, contre 5713,4 milliards en 2012. Le rapport note, à ce propos, qu’«une telle capacité de financement représente 34,1% du produit intérieur brut, 95% des recettes totales, et 92,6% des dépenses publiques au titre de l’année 2013». S’agissant des transferts sociaux pour 2013, ils ont atteint 1 268,4 milliards de dinars (15 milliards de dollars), soit 20% des dépenses de l’État (6 092,1 milliards), selon le rapport de 2013 de la Banque d’Algérie sur l’évolution de la situation monétaire et économique. Aussi, il est question dans ledit document d’une hausse des dépenses de fonctionnement, accompagnée par une stagnation des investissements publics, qui sont estimés autour de 1 900 milliards de dinars en 2012 à 2 275,5 milliards, et pour l’année 2013, l’État avait investi 1 887,8 milliards dans les projets d’infrastructures. Il est question pour la masse salariale de 1 850 milliards de dinars, contre 910,9 milliards en 2009, la masse salariale de l’État a connu une hausse, en 2012, atteignant 1 988,4 milliards de dinars contre 1 774,7 milliards en 2011 et 1 212,6 milliards en 2010.
Contrôle des banques et établissements
Dans le rapport de Laksaci, le chapitre relatif au contrôle des banques et établissements financiers, outre qu’il relève plusieurs infractions, il note qu’ils sont en hausse par rapport à 2012. Le contrôle sur pièces effectué sur la base des informations émises par les banques primaires et les établissements financiers, a permis de montrer une hausse du nombre d’infractions commises, notamment celles relatives à «la non-conformité à la règlementation en vigueur», est-il mentionné dans le rapport. Hausse estimée à 35,4%, selon le document de Laksaci par rapport à l’année 2012. Il s’agit à ce propos de «65 cas de non-respect des normes règlementaires imputables à 11 institutions, dont 29,2% enregistrés par les banques publiques, contre 20,8% en 2012» et «6% pour les banques privées qui n’avaient pas commis d’infractions, durant l’année précédente (ndlr, 2012).
La violation de la règlementation a touché aussi les établissements financiers publics, selon le rapport qui l’estime à 46,2%, pour l’année 2013, contre 41,7% en 2012, une hausse de 4,5%. Concernant les établissements financiers privés, le document de Laksaci indique un taux de 18,5% en matière d’infractions. Selon le rapport de la Banque d’Algérie, «les normes légales règlementaires ayant fait l’objet de non-respect sont relatives au ratio individuel de division des risques (25% des fonds propres nets), à l’actif net en rapport avec le capital minimum règlementaire, à la limite des positions de change et un coefficient de liquidité.»
En conclusion de ce contrôle sur pièces, «les établissements ayant respecté toutes les dispositions règlementaires, sur la base des déclarations transmises, sont au nombre de 18, contre 23 l’année d’avant», estime-t-on. Aussi, il est question d’une «amélioration» en matière de contrôle interne et de surveillance et mesure des risques par certains établissements.
Le rapport de Laksaci indique à ce propos que c’est par «la mise à niveau de leur système d’informations permettant d’assurer une surveillance efficace et permanente des risques encourus» que les améliorations en question ont été possibles. Par ailleurs, il est aussi question d’une amélioration «des dispositifs de gestion de risque de crédit», est-il montionné, toutefois, les dispositifs demeurent «insuffisants compte tenu de «l’absence d’un système de notation interne» à même d’assurer une meilleure qualité d’analyse des risques de crédits. Aussi, nous pouvons litre dans le rapport de Laksaci que «compte tenu de la nature des opérations, dont certaines en relation avec le volet commerce extérieur et/ou blanchiment d’argent, des procès-verbaux d’infraction à la législation et à la règlementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger ont été dressés aux termes de la mission».
Karima Bennour