Barack Obama a annoncé, jeudi soir, avoir autorisé des frappes aériennes ciblées pour contrer l’avancée des djihadistes dans le nord de l’Irak, tandis que des colis humanitaires étaient largués dans le but d’empêcher un «génocide potentiel» des minorités religieuses assiégées. L’autorisation porte sur des frappes aériennes «ciblées», a précisé le président américain. Il s’agit de protéger le personnel américain en cas de poursuite de l’avancée des djihadistes de l’Etat islamique (EI) vers Erbil, capitale de la région semi-autonome du Kurdistan irakien, où se trouve un consulat américain. Les frappes seront aussi utilisées en cas de menace contre des ressortissants américains en Irak en général. Les islamistes sunnites ne seraient plus qu’à une demi-heure de route d’Erbil. Des photographies de Reuters montrent ce qui ressemble à des djihadistes de l’EI en train de contrôler un point de passage dans la zone frontalière du Kurdistan, à un peu moins de 30 minutes d’Erbil. Cette ville de 1,5 million d’habitants est également le siège de nombreuses entreprises. Les frappes aériennes, qui seront les premières menées par les Etats-Unis en Irak depuis leur retrait en 2011, pourront aussi être mises en œuvre en soutien aux forces kurdes et irakiennes qui essaient de rompre les rangs de l’EI qui assiège les montagnes du Sinjar, où se sont refugiés des dizaines de milliers de civils appartenant à la minorité des Yazidis, des Kurdes adeptes d’un culte dérivé du zoroastrisme. La prise de Karakoch, ville du nord de l’Irak qui abritait la plus importante communauté chrétienne du pays, a également jeté des milliers de personnes sur les routes. «Nous pouvons agir avec soin et de manière responsable pour éviter un génocide potentiel», a déclaré le chef de la Maison Blanche qui a décrit les djihadistes comme des «barbares».
«ÉVITER UN MASSACRE»
Barack Obama, qui s’exprimait à l’issue d’une réunion de son équipe de sécurité nationale, a promis au public américain de ne pas engager de forces au sol et a exclu que les Etats-Unis se laissent entraîner dans une nouvelle guerre, rappelant qu’il avait notamment fait campagne en 2008 pour mettre fin à la guerre déclenchée en Irak cinq ans plus tôt. «Nous allons rester vigilants et nous passerons à l’action si ces forces terroristes menacent nos personnels ou nos implantations partout en Irak, notamment notre consulat à Erbil et notre ambassade à Bagdad», a prévenu Barack Obama.
«Lorsque nous sommes confrontés à une situation comme celle qui se déroule sur cette montagne, où des populations innocentes sont confrontées à la perspective de violences sur une échelle atroce (…), lorsque nous avons les capacités uniques d’éviter un massacre, alors je crois que les Etats-Unis d’Amérique ne peuvent pas détourner le regard», a-t-il dit. Selon le département de la Défense, les avions américains ont largué 72 colis divers dont 8.000 rations alimentaires et des milliers de litres d’eau potable pour les civils près de Sinjar. Les avions, un C-17 et deux C-130, escortés par deux chasseurs F/A-18 Hornet, ont décollé de plusieurs bases aériennes dans la région. Ils sont restés sur la zone de largage pendant moins de 15 minutes en volant à faible altitude. Certains à Washington, comme le sénateur républicain Lindsay Graham, tout en se disant d’accord avec les mesures annoncées, ont exprimé leurs doutes. «Les actions annoncées ce soir n’inverseront pas le cours de la bataille», a-t-il dit sur Twitter. Le secrétaire général de l’Onu et le Conseil de sécurité des Nations unies ont condamné les attaques de l’Etat islamique et appelé la communauté internationale à soutenir le gouvernement et le peuple irakiens. L’ambassadeur du Royaume-Uni, Mark Lyall Grant, qui préside en août le Conseil de sécurité, a ajouté qu’il ferait circuler un projet de résolution qu’il espère faire adopter dans les prochains jours et qui visera notamment les réseaux de financement et les canaux de recrutement de l’Etat islamique. Après s’être entretenu par téléphone avec le président du Kurdistan Massoud Barzani, François Hollande a fait savoir que la France était prête à soutenir les forces engagées dans la défense du Kurdistan irakien. Le président français n’a pas dit comment.