Plus d’une douzaine d’anciens hauts responsables israéliens ont lancé un appel inédit à l’arrêt immédiat de la guerre contre Ghaza, dénonçant l’ampleur des pertes subies par l’entité sioniste, tant sur le plan militaire que stratégique.
Dans une déclaration vidéo relayée par plusieurs médias israéliens, ils appellent à un cessez-le-feu durable et à un accord global de libération des prisonniers. Parmi les signataires de cet appel figurent des figures de premier plan de l’establishment militaire et sécuritaire israélien : l’ancien Premier ministre et chef d’état-major Ehud Barak, ainsi que les anciens chefs d’état-major Moshe Ya’alon et Dan Halutz, ou encore les ex-directeurs du Shin Bet (services de sécurité intérieure) Yuval Diskin, Yoram Cohen et Ami Ayalon. Dans la vidéo publiée ce dimanche, ces anciens hauts responsables affirment que « la guerre à Ghaza aurait dû être terminée depuis longtemps », estimant que la prolongation du conflit n’apporte rien d’autre que souffrances, isolement diplomatique et pertes humaines. Ils demandent un arrêt immédiat des hostilités par le biais d’un cessez-le-feu permanent et la conclusion d’un accord global de libération des quelque 50 prisonniers israéliens encore retenus dans l’enclave palestinienne. Ami Ayalon, ancien directeur du Shin Bet, a averti que cette guerre « conduit Israël à la perte de sa sécurité et de son identité ». Quant à Nadav Argaman, également ex-patron du service de sécurité intérieure, il a reconnu que l’armée israélienne tente aujourd’hui surtout de « compenser ses pertes », qualifiant la guerre de vaine. Il a exhorté les responsables de la sécurité actuellement en fonction à « faire preuve de courage » et à dire ouvertement au gouvernement et au Premier ministre que cette guerre est une impasse. Ces critiques sévères interviennent dans un climat de tensions accrues entre les sphères militaires et politiques. La radio de l’armée d’occupation israélienne a récemment rapporté un fort désaccord entre le chef d’état-major Eyal Zamir et le gouvernement. Zamir aurait exigé des directives claires concernant la poursuite de la guerre à Ghaza, soulignant l’absence de stratégie cohérente.
L’échec de l’opération
« Chariots de Gideon » et isolement international
Dans une interview accordée à la chaîne israélienne Channel 12, le général de réserve Noam Tibon a également tiré la sonnette d’alarme. Il a affirmé qu’Israël se retrouve dans une situation catastrophique après l’opération militaire « Chariots de Gideon », qui s’est soldée par la mort d’environ 50 soldats israéliens. Tibon a déclaré que cette opération avait non seulement échoué à atteindre ses objectifs, mais avait aussi plongé Israël dans un isolement diplomatique sévère, dû notamment à la politique de famine délibérée imposée à Ghaza. Selon lui, au lieu de poursuivre cette stratégie perdante, l’État hébreu aurait dû relancer les négociations autour de l’accord d’échange de prisonniers proposé jadis par l’administration Trump, qui comprenait des étapes progressives. « Le gouvernement de Netanyahou a saboté la deuxième phase de cet accord, et les captifs israéliens que nous voyons encore aujourd’hui auraient pu rentrer chez eux à l’occasion de l’indépendance ou de Pessah », a-t-il ajouté. Le général Tibon a par ailleurs alerté sur les conséquences économiques de la guerre et les risques juridiques qui pèsent désormais sur les soldats israéliens à l’étranger, en raison de leur implication potentielle dans des crimes de guerre à Ghaza. « Ils pourraient être arrêtés dans d’autres pays. La faim utilisée comme arme, les bombardements sur les hôpitaux, les écoles et les civils sont autant d’éléments qui placent Israël dans une position de plus en plus vulnérable sur la scène internationale », a-t-il prévenu.
Une contestation inédite de l’intérieur
Cet appel collectif d’anciens chefs militaires et de la sécurité intérieure marque une rupture rare dans le consensus habituel autour des guerres menées par Israël. Leur message est clair : l’actuelle campagne militaire à Ghaza est une impasse stratégique, morale et politique, et elle met en danger non seulement les otages, mais aussi la sécurité nationale et la réputation d’Israël dans le monde. Le gouvernement de Benjamin Netanyahou, embourbé dans des polémiques internes, continue toutefois de rejeter tout cessez-le-feu, affirmant vouloir poursuivre l’offensive « jusqu’à la destruction totale du Hamas ». Mais les voix dissonantes se multiplient, à mesure que l’armée s’enlise et que l’opinion publique israélienne, lassée par les pertes et le flou stratégique, commence à douter du bien-fondé de cette guerre interminable.
M. Seghilani