Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemâa, avait affirmé, lors de ses réponses aux questions des députés, sur le projet de loi portant mobilisation générale, que cette législation « vise à doter l’État d’un instrument légal pour faire face à des situations de crise ou de menace grave. Le ministre a réitéré l’importance de ce texte de loi qu’il a qualifié «de cadre juridique applicable en cas de nécessité, pour protéger la sécurité de la société et du pays». Expliquant que cette législation se veut à la fois préventive, structurante et protectrice, le ministre rappelle que le principe de mobilisation générale est déjà prévu dans la Constitution. «D’où la nécessité de la promulgation de ce projet de loi sur la mobilisation générale, pour parachever les règles juridiques et procédurales régissant cette question», avait-t-il souligné. Une telle démarche procède d’une volonté « d’harmoniser la législation infra-constitutionnelle avec la Loi fondamentale ». La législation sur la mobilisation générale s’inscrit en ce sens dans une logique de sécurité nationale, de légitimité constitutionnelle et de transparence institutionnelle, de renforcement de leurs capacités et de consolidation de leur résilience à même de faire face à toute menace pouvant survenir d’un contexte de plus en plus tendu à double échelle régionale et internationale. La loi s’inscrit, donc, dans un contexte de sécurisation globale, où l’État cherche à renforcer sa souveraineté face à des risques internes et externes. Le nouveau texte balise les conditions de la mobilisation générale, en abordant tous les aspects y afférents, allant de la préparation à la mise en œuvre, et en passant par les dispositions financières et pénales. Il stipule, en effet, une série de modalités claires d’application, lesquelles constituent des mesures exceptionnelles en cas d’activation de la mobilisation générale dans un cadre légal permettant une coordination efficace entre les institutions. «En cas de proclamation de cette dernière, des mesures exceptionnelles seront mises en place», a en effet précisé le ministre, non sans mettre l’accent que cette loi est aussi garante du respect des droits fondamentaux des citoyens.
Preuve en est, l’article stipulant que les citoyens peuvent saisir la justice, pour obtenir réparation s’ils subissent un préjudice du fait de la mobilisation. L’article en question offre en effet la possibilité aux citoyens «de recourir aux juridictions, pour obtenir réparation d’un acte ayant porté atteinte à une personne ou à son patrimoine financier», a expliqué le ministre.
A. N.
MUSTAPHA KHIATI, PRÉSIDENT DE LA FOREM :
« Un dispositif indispensable pour un pays comme l’Algérie »
L’adoption en Conseil des ministres, avril dernier, du projet de loi sur la mobilisation générale, paru avant-hier, dimanche au Journal officiel, représente, pour Mustapha Khiati, une décision « importante » qui aurait dû être prise depuis 1962.
Pour le président et fondateur de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et du développement de la recherche en Algérie (FOREM), également professeur en pédiatrie à l’Université d’Alger, et médecin-chercheur, cette loi est « indispensable » pour un pays comme l’Algérie. Relevant dans ses déclarations au Courrier d’Algérie, que « tous les pays ont des lois de ce type pour s’organiser en cas d’événement exceptionnel », Khiati s’est interrogé sur le fait que ce dispositif ne soit pas activé depuis 1962, soit au lendemain de l’indépendance de l’Algérie, alors que cela devait se faire. «Pour moi cette loi représente bien le dicton : «gérer c’est prévoir ». Pour un pays comme le notre, il est important de mettre des dispositifs de ce genre pour anticiper les grands problèmes auxquels on pourrait faire face. Il ne faut pas attendre le dernier moment pour prendre des décisions », a-t-il déclaré au Courrier d’Algérie.
« La Covid-19 à l’origine de sa mise en place »
Par ailleurs, le président de la FOREM estime que l’avènement de la pandémie du Covid-19 a été l’élément déclencheur ayant poussé les hautes autorités à penser à mettre en place le mécanisme de la mobilisation générale, tenant à rappeler dans ce sens, que le Covid-19 a été également à l’origine de la création de l’Agence nationale de sécurité sanitaire « même si celle-ci ne répond pas aujourd’hui aux attentes des décideurs », a-t-il fait remarquer. « Cette juridiction est mise en place de sorte à permettre de gérer des situations exceptionnelles, que ce soit une situation de guerre ou autre parce que la pandémie du COVID-19 c’est une situation de guerre biologique en quelque sorte », a expliqué notre interlocuteur. Pour Khiati ; « beaucoup pensent que la loi est seulement relative à une situation de guerre mais ce n’est pas tout à fait ça ! Un conflit quelconque pourrait être certes un des éléments qui pourraient pousser à activer ce dispositif mais à mon avis l’idée est partie à partir de la conjoncture du COVID-19, d’autant plus que les scientifiques annoncent dans le futur des situations de pandémies plus graves que celles du COVID» a-t-il encore insisté.
« S’organiser en cas de situation exceptionnelle »
Dans le même cadre d’idées, le président de la FOREM a expliqué que même si l’Algérie dispose de plan (Orsec) pour les séismes et les grandes catastrophes il manquait toutefois des dispositions juridiques en dehors de ces situations. Il a rappelé, à titre d’exemple, que lors de la pandémie du COVID-19, il n’y avait pas cette base juridique, et la société civile s’était mobilisée tant bien que mal pour essayer d’apporter un plus en fonction des besoins urgents exprimés, lors de cette conjoncture, sans qu’il y ait d’organisation ». Selon Khiati,
« c’est après cette expérience, que les responsables ont réfléchi et ont proposé cette nouvelle disposition juridique pour canaliser les potentialités nationales en cas de situation extrêmement grave, même si celle-ci est en vue d’être activée dans un moment ou les circonstances sont tout autres et que l’Algérie soit menacée de l’extérieur ».
Ania N.