Ce cri déchirant, répété avec insistance par les travailleurs humanitaires, les médecins et les familles palestiniennes, résume la tragédie qui se joue actuellement dans l’enclave martyre.
Ce n’est pas la pénurie naturelle ou le hasard qui affament le peuple palestinien de Ghaza, mais une politique méthodique d’asphyxie organisée par l’entité sioniste et ses alliés occidentaux, qui transforment la famine en une stratégie de guerre, inscrite pleinement dans le projet génocidaire et de déplacement forcé d’une population entière.
Deux enfants supplémentaires sont morts de faim hier matin : le petit Youssef Al-Safadi au nord du territoire et Abdelhamid Al-Ghalban à Khan Younès. Ils rejoignent une longue liste d’innocents. En 72 heures seulement, ce sont 21 enfants qui ont succombé à la malnutrition aiguë. En deux jours, 23 Palestiniens – dont plusieurs enfants – sont morts faute de nourriture. Les hôpitaux de Ghaza, débordés et sans moyens, accueillent chaque jour des centaines de cas de malnutrition sévère. On y traite des enfants en état de choc, des adultes en détresse cognitive, souffrant de pertes de mémoire, d’évanouissements répétés, de douleurs extrêmes dues à la faim. Plus de 17 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë sévère selon les sources médicales locales. Et 900 000 enfants sont déjà touchés par la faim, dont 70 000 dans un état critique.
La famine comme outil de déplacement forcé
Cette famine n’est ni une conséquence secondaire du conflit ni une défaillance de l’aide humanitaire. Elle est volontaire. Stratégique. Elle vise à faire fuir les habitants de Ghaza en leur ôtant toute possibilité de survivre sur leur terre. Les témoignages convergent : affamer les civils palestiniens, puis bombarder ceux qui s’approchent des points de distribution d’aide, comme à ElQods Street ou à Rafah, est devenu un mode opératoire. À défaut d’expulsion directe, l’occupant cherche à rendre la vie impossible pour pousser à l’exode. Dans ce cadre, l’usage de la famine est reconnu par le droit international comme un crime de guerre, voire un crime contre l’humanité, et constitue l’un des éléments constitutifs du crime de génocide selon la Convention des Nations unies de 1948. Pendant ce temps, les responsables occidentaux feignent l’impuissance. On se demande dans les chancelleries, y compris parmi les États disposant du droit de veto à l’ONU, « comment obtenir un cessez-le-feu » ou « comment mettre fin à la famine ». Certains, comme le président du principal fournisseur d’armes à Israël, laissent même entendre qu’il faudra peut-être encore « quelques semaines » pour un arrêt des hostilités, tout en déployant sur le terrain des soldats déguisés en humanitaires, dont les bases sont elles-mêmes devenues des cibles de massacre. Comment peut-on parler d’aide humanitaire tout en soutenant l’un des blocus les plus inhumains de notre temps ? Comment prétendre œuvrer pour la paix tout en privant un peuple de pain, d’eau et de soins ? La réponse est crue, brutale, mais nécessaire : le silence occidental n’est pas une neutralité. C’est une complicité. L’UNRWA – l’agence onusienne en charge des réfugiés palestiniens – tire la sonnette d’alarme : ses propres employés envoient des « messages de faim désespérés », tant la situation est devenue insoutenable. De mars à juin, les cas de malnutrition aiguë sévère chez les enfants de moins de cinq ans ont doublé. Près de 5 500 enfants sont en danger immédiat de mort. De son côté, Médecins sans frontières (MSF) alerte sur un effondrement total du système de santé, incapable d’absorber la masse des enfants et adultes affamés. Deux de ses cliniques à Ghaza enregistrent des taux de malnutrition « jamais vus auparavant ».
L’eau aussi, transformée en arme de guerre
Comme si la faim ne suffisait pas, l’eau est également utilisée comme levier de terreur. La municipalité de Ghaza a annoncé que la station principale de dessalement de l’eau s’est arrêtée, faute de carburant et en raison des bombardements. Le réseau de distribution est hors service, affectant plus de 1,2 million de personnes. La ville entre dans une phase critique de soif. Les puits ne fonctionnent plus. Le réseau israélien « Mekorot », seul à fournir un peu d’eau à Ghaza depuis l’extérieur, a cessé ses livraisons. En parallèle, les bombardements se poursuivent sans relâche. Le camp de réfugiés d’Al-Shati a été de nouveau ciblé, entraînant la mort de 15 civils, dont plusieurs enfants. À Deir el-Balah, dans le quartier de Al-Hakar, deux Palestiniens sont morts sous les bombes. À Khan Younès, à Jabaliya, à ElQods Street, les points de distribution de l’aide sont devenus les nouveaux fronts du massacre. Au total, plus de 59 106 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre 2023, dont une majorité d’enfants et de femmes. Et les chiffres continuent de grimper. Les corps s’amoncellent sous les décombres, sans que les secours puissent accéder aux zones ciblées. Ce qui se passe à Ghaza n’est pas une tragédie naturelle. C’est un projet politique, planifié, exécuté avec méthode, soutenu par un silence international cynique. L’affamement, comme le siège, les bombardements et les déplacements, constitue un pilier du génocide en cours. Il vise à effacer un peuple, non seulement de ses terres, mais de l’histoire. Ghaza ne meurt pas. On l’extermine et ceux qui regardent ailleurs en prétendant chercher des solutions diplomatiques en sont les complices. « Ce n’est pas la nourriture qui manque à Ghaza. Ce sont les consciences dans le reste du monde. »
M. Seghilani