La reconnaissance internationale de l’État de Palestine continue de gagner du terrain. Un nouveau tournant symbolique et politique a été franchi ce vendredi à Genève, lorsque l’Organisation internationale du travail (OIT) a officiellement élevé la Palestine au rang d’État observateur non membre, rompant avec la précédente désignation de « mouvement de libération nationale ».
Cette décision historique, adoptée lors de la 113ᵉ session du Congrès général de l’OIT, a été approuvée par 386 voix pour, 15 contre et 42 abstentions, témoignant d’un soutien écrasant à la cause palestinienne, malgré les tensions internationales et les pressions politiques exercées par certains États membres. Le Congrès s’est tenu dans une atmosphère lourde de symboles et de solidarité. À Genève, la quasi-totalité des représentants présents, des délégations étatiques aux organisations syndicales, portaient autour du cou la koufiya palestinienne – ce foulard devenu emblème mondial de la résistance et de la dignité. Beaucoup y avaient également accroché de petits drapeaux palestiniens. Ce geste unanime a incarné un message fort de soutien à la Palestine, dans un contexte où les bombardements incessants sur Ghaza, menés par l’entité sioniste depuis octobre 2023, ont causé une catastrophe humanitaire sans précédent. Mais le moment le plus révélateur de cette mobilisation s’est produit lorsque le représentant de l’entité sioniste a pris la parole. Dans un geste rare et hautement symbolique, la majorité des représentants des États, des syndicats et des ONG ont quitté la salle, en silence, refusant d’accorder la moindre légitimité à un discours défendant l’occupation et l’agression. Ce boycott spontané a marqué les esprits et renforcé le message de rejet de l’impunité. Du côté palestinien, cette évolution a été saluée avec émotion et reconnaissance. Dans un communiqué publié vendredi soir, le ministère palestinien des Affaires étrangères et des Expatriés a exprimé sa gratitude envers les États et les délégations qui ont soutenu la résolution. Le ministère a qualifié cette élévation de statut de « décision historique », fruit d’années d’efforts diplomatiques menés par la diplomatie palestinienne, en particulier par la Mission permanente de l’État de Palestine auprès des Nations unies à Genève. Il a rappelé que cette reconnaissance permet désormais à la Palestine de jouir de droits élargis au sein de l’OIT, y compris la participation aux réunions du Conseil d’administration, aux conférences régionales et aux comités techniques. Cette décision s’appuie notamment sur la recommandation du Conseil d’administration de l’OIT, adoptée en novembre 2024 lors de sa 352ᵉ session, qui avait appelé à renforcer la participation de l’État de Palestine aux travaux de l’organisation. Le ministère a également appelé les pays qui se sont abstenus ou ont voté contre à « reconsidérer leurs positions », soulignant que la reconnaissance des droits du peuple palestinien est une exigence morale et politique à l’heure où Ghaza est ravagée par la guerre. La décision de l’OIT intervient dans un contexte de mobilisation syndicale mondiale inédite en faveur de la Palestine. Depuis plusieurs mois, des confédérations syndicales internationales, des fédérations de travailleurs et des milliers d’organisations locales ont multiplié les prises de position, les actions de solidarité et les appels à sanctionner l’occupation israélienne. Cette dynamique s’inscrit dans une série d’initiatives internationales qui visent à rompre l’isolement diplomatique de la Palestine et à lui conférer un statut pleinement étatique au sein des institutions multilatérales. Elle fait également écho aux récentes reconnaissances officielles de l’État palestinien par plusieurs pays d’Europe et d’Amérique latine, accélérant ce que beaucoup appellent désormais un « déluge diplomatique » en faveur de la cause palestinienne. En accordant à la Palestine le statut d’État observateur, l’OIT envoie un signal fort à la communauté internationale : le peuple palestinien existe, résiste et doit être reconnu comme tel dans l’ordre mondial. Au-delà du symbole, cette reconnaissance élargit la capacité de la Palestine à peser sur les débats internationaux liés aux droits des travailleurs, à la justice sociale et à la reconstruction économique. Alors que la situation à Ghaza reste dramatique – avec des milliers de morts, des infrastructures détruites et une population assiégée –, la solidarité internationale semble franchir un cap. Les gestes de soutien, les votes symboliques et les boycotts politiques prennent une dimension nouvelle face à l’indifférence des grandes puissances occidentales. Le vote de l’OIT rappelle que la légitimité d’un peuple ne se mesure pas à la force militaire, mais à la résistance de ses droits et à la solidarité des peuples. Et à Genève, ce vendredi, la voix de la Palestine s’est faite entendre plus fort que jamais.
M. Seghilani