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LA CIJ ENQUÊTERA-T-ELLE ENFIN APRÈS 17 MOIS DE BLOCUS ET DE FAMINE INSTRUMENTALISÉS À GHAZA ? : Des audiences jusqu’au 2 mai prochain

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Après dix-sept mois d’un conflit dévastateur, marqué par des bombardements incessants et une crise humanitaire d’une ampleur sans précédent, la bande de Ghaza est au cœur d’une bataille juridique cruciale devant la Cour internationale de justice (CIJ) à La Haye.
Depuis hier, la plus haute instance judiciaire des Nations unies examine les obligations d’Israël envers l’ONU et ses agences dans les territoires palestiniens occupés, une démarche initiée par une résolution de l’Assemblée générale en décembre dernier, sous l’impulsion de la Norvège. L’objectif principal de ces audiences, qui se poursuivront jusqu’au 2 mai, est d’obtenir un avis consultatif de la CIJ sur le devoir impérieux d’Israël de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire d’urgence à une population au bord du gouffre et de garantir sa non-obstruction. L’enjeu de ces plaidoiries orales est immense. Quarante-quatre États, incluant des puissances mondiales telles que les États-Unis, la Chine, la France et la Russie, ainsi que des organisations internationales influentes comme la Ligue des États arabes, l’Organisation de la coopération islamique et l’Union africaine, ont répondu à l’appel et participeront à ces débats cruciaux. L’État de Palestine a ouvert le bal, présentant avec émotion et force son argumentation durant la première journée. Le contexte de ces audiences est alarmant. Israël exerce un contrôle quasi-total sur l’accès de l’aide humanitaire à Ghaza, où 2,4 millions de Palestiniens luttent pour leur survie face à une crise humanitaire qualifiée de « sans précédent » par les observateurs internationaux. Le blocus imposé par Israël s’est intensifié depuis le début mars, coïncidant avec la fragilisation puis la rupture d’un cessez-le-feu précaire, conséquence directe de la violation des accords par le gouvernement d’occupation après quinze mois de combats acharnés. La situation sur le terrain est désastreuse. Philippe Lazzarini, Commissaire général de l’UNRWA, a tiré la sonnette d’alarme en décrivant la situation à Ghaza comme une « famine fabriquée par l’homme et motivée politiquement ». Les chiffres de l’ONU sont éloquents : près d’un demi-million de Palestiniens ont été contraints au déplacement depuis la reprise des hostilités mi-mars, suite à l’effondrement d’une trêve de seulement deux mois. L’organisation onusienne n’hésite pas à qualifier la catastrophe humanitaire en cours de « peut-être la pire » depuis le début de ce long et sanglant conflit. Si les avis consultatifs de la CIJ ne possèdent pas de caractère juridiquement contraignant, leur poids moral et politique sur la scène internationale est indéniable. La Cour avait déjà pris position en début d’année, appelant Israël à prévenir tout acte pouvant s’apparenter à un génocide et à autoriser l’acheminement de l’aide. En mars, elle avait réitéré cette demande en exigeant des mesures supplémentaires pour contrer la famine qui ravage la bande de Ghaza, suite à une requête de l’Afrique du Sud. De plus, un avis consultatif rendu en juillet dernier avait qualifié l’occupation israélienne des territoires palestiniens d' »illégale », appelant à sa cessation immédiate. Dans un développement poignant lors de l’ouverture des audiences, l’État de Palestine, par la voix de son représentant auprès des organisations internationales, Ammar Hijazi, a lancé une accusation d’une gravité extrême : Israël utiliserait délibérément le blocage de l’aide humanitaire comme une « arme de guerre » contre la population civile de Ghaza. « La faim est ici. L’aide humanitaire est en train d’être utilisée comme une arme de guerre », a-t-il déclaré avec une émotion palpable devant les juges de la CIJ. Cette accusation terrible met en lumière une dimension particulièrement sombre du conflit. Au-delà des destructions causées par les bombardements incessants, la manipulation de l’aide humanitaire comme instrument de pression et de punition collective soulève des questions fondamentales sur le respect du droit international humanitaire et des obligations d’Israël en tant que puissance occupante. La semaine d’audiences qui s’ouvre à La Haye est donc d’une importance capitale.
La communauté internationale attend avec espoir que les arguments présentés par les nombreux États et organisations internationales participants puissent éclairer les obligations d’Israël et exercer une pression accrue pour garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave à une population exsangue après dix-sept mois de souffrance indicible. Reste à savoir si, cette fois, le cri de désespoir de Ghaza sera enfin entendu et si la justice internationale pourra jouer un rôle décisif pour alléger le fardeau d’une tragédie humanitaire qui n’a que trop duré.
M. Seghilani

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