Le général Joseph Aoun, chef de l’armée libanaise, a été élu président de la République du Liban après un second tour de scrutin parlementaire, mettant ainsi fin à une crise politique qui a laissé le pays sans chef d’État depuis octobre 2022. Aoun a obtenu 99 voix sur 128 au Parlement, surpassant la majorité requise de 86 voix, après avoir recueilli seulement 71 voix au premier tour plus tôt dans la journée.
L’annonce de sa victoire a été accueillie par des applaudissements et des cris de joie au Parlement. Immédiatement après, Joseph Aoun a prêté serment en tant que président et a promis, dans son discours, de jouer un rôle d’arbitre équitable entre les institutions du pays : « Aujourd’hui commence une nouvelle phase dans l’histoire du Liban. Je vous promets d’exercer les pleins pouvoirs du président de la République en tant qu’arbitre équitable », a-t-il déclaré. Les réactions à son élection ont été nombreuses. Le mufti Jaafari, Cheikh Ahmad Kabalan, a félicité le nouveau président, soulignant que « le moment est venu de sauver la situation très complexe du Liban », tout en évoquant la fragilité du pays et de la région.
L’évêque melkite de Zahlé, Mgr Ibrahim Mikhael Ibrahim, a également salué l’élection de Joseph Aoun et lui a souhaité succès dans la direction du pays, tout en soulignant les défis immenses auxquels il devra faire face. Dans son discours, Joseph Aoun a insisté sur le fait que son élection marquait le début d’une « nouvelle ère » pour le Liban. Il a promis des consultations rapides pour la nomination d’un Premier ministre qui devra obtenir la confiance de la communauté internationale et entreprendre des réformes économiques cruciales, ainsi que la reconstruction des zones dévastées, notamment dans le Sud du pays. Il a également évoqué la nécessité d’une « stratégie de défense complète », pour permettre au Liban de mettre fin à l’occupation sioniste et de repousser les agressions israéliennes.
Il a assuré vouloir développer « les meilleures relations possibles avec les pays arabes frères » et a plaidé pour un « dialogue sérieux et respectueux » avec l’État syrien afin de discuter de tous les dossiers en suspens. Dans le domaine intérieur, Aoun a souligné son refus de toute ingérence dans le système judiciaire, affirmant qu’il n’y aurait « aucune immunité pour les criminels ou les corrompus » et qu’il n’y avait « pas de place pour les mafias, le trafic de drogue ou le blanchiment d’argent » dans son mandat.
Un tournant vers la stabilité et les réformes, selon l’ONU
La coordonnatrice spéciale des Nations unies au Liban, Jeanine Hennis-Plasschaert a exprimé ses félicitations à l’issue de l’élection de Joseph Aoun en tant que nouveau président du Liban, soulignant que cette élection constituait « une première étape tant attendue pour surmonter le vide politique et institutionnel » que traverse le pays. Elle a ajouté que cette élection permettrait au peuple libanais de bénéficier d’institutions gouvernementales efficaces, capables de répondre à ses attentes. Elle a également insisté sur l’urgence de nommer un Premier ministre et de former un gouvernement sans délai, soulignant que les défis auxquels fait face l’État libanais sont considérables et qu’il ne peut se permettre de perdre davantage de temps. Selon elle, « il est désormais essentiel que chaque responsable mette les intérêts du Liban au-dessus de toute considération personnelle ou politique. » Jeanine Hennis-Plasschaert a rappelé que l’élection d’un nouveau président apporte un nouvel espoir pour le Liban, ouvrant la voie à des progrès dans la consolidation de la cessation des hostilités, ainsi que dans le renforcement de la sécurité et de la stabilité du pays. Elle a également souligné l’importance d’une gouvernance solide, renforçant l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire libanais et poursuivant des réformes globales et durables. Enfin, elle a exprimé la volonté des Nations Unies de collaborer avec le président Aoun et les autorités libanaises pour soutenir le pays dans la mise en œuvre de mesures concrètes et réalisables en vue d’atteindre ces objectifs.
Une figure de compromis
Joseph Aoun, né le 10 janvier 1964 dans une famille maronite de la banlieue de Beyrouth, est diplômé de l’Académie militaire libanaise et de l’Université libanaise américaine de Beyrouth, où il a obtenu une licence en sciences politiques et en relations internationales. Il a aussi suivi des formations militaires aux États-Unis, notamment en matière de lutte contre le terrorisme. Il parle couramment l’anglais et le français. Depuis 2017, il dirige l’armée libanaise et a su préserver son intégrité malgré les défis politiques et économiques du pays. Sous sa direction, une grande campagne anti-corruption a été lancée au sein des forces armées. Il est perçu comme une figure de compromis, capable de naviguer dans le système politique complexe et confessionnel du Liban. Avec cette élection, Joseph Aoun prend les rênes d’un pays traversant une crise profonde, marqué par des divisions politiques internes et des défis économiques majeurs. Sa présidence pourrait être déterminante pour l’avenir du Liban dans un contexte régional tendu.
M. Seghilani