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MAKHZEN ET TRAFIC INTERNATIONAL DE DROGUE : La « Mocro Maffia » menace l’Europe et l’Afrique du Nord

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Alors que s’est ouvert à Rotterdam, le procès de Ridhouane Taghi, le présumé chef du réseau transnational Mocro Maffia, Europol (centrale européenne de police), a réussi à réunir de solides preuves impliquant cette organisation maffieuse dans le trafic international de drogue, la corruption, le blanchiment d’argent la corruption active de certains responsables politiques européens.

L’enquête a également permis de découvrir les connexions entre les pontes de cette organisation et les services secrets marocains et le Makhzen. Lorsque les Pays-Bas ont légalisé le marché du cannabis dans les années 1970, des ressortissants néerlandais et belges d’origine marocaine ont puisé dans leurs liens familiaux avec des producteurs marocains de cannabis dans les montagnes. Petit à petit, les banals dealers ont fait prospérer leurs affaires grâce au trafic de haschich avant de faire la jonction avec les cartels sud-américains spécialisés dans le trafic de cocaïne, une drogue plus lucrative. Le puissant cartel de la drogue Mocro Maffia est né de cette jonction durant les années 1990. Travaillant principalement depuis la Belgique et les Pays-Bas, il contrôle aujourd’hui un tiers du marché européen de la cocaïne. Ridhouane Taghi qui est poursuivi pour son implication dans 13 assassinats de journalistes ayant enquêté sur les activités du réseau maffieux, d’opposants marocains et de personnalités politiques se targuait de s’offrir les services de toutes les institutions belges, espagnoles et néerlandaises grâce à la corruption qui est le principal catalyseur du trafic de cocaïne d’Amérique latine vers Rotterdam et Anvers via l’Afrique.

Des tentacules jusqu’en Amérique Latine
Pour les cartels de la drogue d’Amérique latine, la capacité de la mafia Mocro à corrompre les responsables gouvernementaux en a fait un allié stratégique. Les échanges audio interceptés via l’application Sky ECC révèlent comment les membres de Mocro Maffia se sont vantés d’avoir soudoyé des douaniers dans le port de Dakar, qui est utilisé comme point de transit. De même, les dockers d’Anvers et de Rotterdam sont payés jusqu’à 100 000 € pour déplacer les conteneurs afin d’éviter les contrôles de police et de douane. Les trafiquants de drogue latino-américains ont de plus en plus utilisé le Maroc et, autres trafiquants implantés au Maroc et en Europe, comme la Mocro Maffia, pour leur commerce transnational de cocaïne. Les cartels colombiens et mexicains ont utilisé le groupe pour faciliter l’acheminement de la drogue vers l’Europe via la ville d’Algésiras, dans le sud de l’Espagne. En peu de temps, la Mocro Maffia est devenue un important groupe de trafiquants en Europe et un sous traitant pour le Makhzen. Ses liens avec des groupes criminels organisés au Maroc et en Amérique Latine en font une menace persistante et croissante pour l’Europe, les États d’Afrique du Nord et leurs populations. Ils sont 17 à comparaître aux cotés de Ridouane Taghi, un néerlandais originaire du Maroc, considéré comme le chef de l’organisation criminelle, et 16 complices pour 13 meurtres et tentatives de meurtre. Si le sang coule autant, c’est pour préserver le contrôle d’un trafic de drogue international qui pèse des milliards d’euros. 110 tonnes de cocaïne ont été saisies par les douanes belge et néerlandaise dans les ports d’Anvers et Rotterdam, mais en réalité, ici, transiteraient dix fois plus de drogue, cachée dans les 12 millions de containers déchargés sur les docks. C’est Europol qui par le biais d’une messagerie électronique, a permis les arrestations. Les messages interceptés étant sans ambiguïté : la drogue, les assassinats commandités, la corruption. Les conversations numériques ont gardé toutes les traces de ce réseau sans foi, ni loi, ultraviolent. Thibault Lefèvre, grand reporter à France Inter, s’est rendu à Amsterdam. Ultra-sécurisé est un terme faible pour définir les contours du procès de Ridhouane et ses comparses : militaires lourdement armés et drones à l’extérieur. Fenêtres cloisonnées, la lumière du jour n’entre pas dans la salle d’audience. Tous les protagonistes sont séparés par du vitrage blindé, les avocats des parties civiles plaident le visage masqué. Les journalistes ne peuvent ni filmer, ni enregistrer, ni photographier, ni même dessiner. Le frère du témoin clé, tué. Son avocat, tué. Et le journaliste d’investigation Peter de Vries, très en vue dans cette affaire puisque témoin à la barre, assassiné en pleine rue, le 6 juillet 2021.
Quand une voiture bélier défonce les locaux du journal *The Daily Telegraph,* en représailles à une couverture très documentée, ou quand Marieke De Witte, qui travaille pour l’agence de presse néerlandaise ANP reçoit des signaux d’intimidation caractérisés, la pression sur l’information n’est pas qu’une vue de l’esprit.

On se demande alors devant ces faits d’une violence inouïe sur le sol européen, comment la Mocro Maffia est à ce point méconnue en France ou en Espagne ?
Le grand reporter de France Inter apporte son analyse : « Il n’y a pas de leader, on peut toujours considérer que le chef présumé est Ridouane Taghi, en réalité, ce sont plusieurs groupes criminels qui travaillent ensemble un jour et peuvent s’opposer le lendemain, d’où les règlements de comptes, les meurtres ».
On est loin des organisations mafieuses fonctionnant avec un système pyramidal à l’ancienne, comme Cosa Nostra en Sicile. Les nouveaux groupes reprennent le symbole de la pieuvre aux multiples tentacules. Si Ridouane Taghi – la peine à perpétuité est requise – passe sa vie derrière les barreaux, cela ne signifie pas pour autant la fin de la Mocro Maffia.
Tant que les containers arriveront à Anvers, Rotterdam et ailleurs, le trafic rémunérateur ne se tarira pas. Et comme le fait remarquer Thibault Lefevre dans une de ses chroniques, « c’est un jeu d’enfant de circuler sur les docks d’Anvers et d’approcher les containers pour récupérer la marchandise. Pas de police, pas de télésurveillance, cela pose question ».
Et cette puissance, il la doit à ses liens avérés avec les services secrets marocains et le Makhzen d’où le potentiel danger qu’il représente pour les pays du sud de l’Europe et l’Afrique du nord notamment l’Algérie devenue sa cible depuis la normalisation des relations diplomatiques du Maroc avec l’entité sioniste.
Les saisies importantes de drogue effectuées par les services de sécurité prouvent que le Maroc mène une « narco-guerre» à l’Algérie, une guerre contrée par les services de sécurité qui ont prouvé leur efficacité à déjouer, jusque-là, les plans du Makhzen.
Slimane B.

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