Les pays vulnérables qui subissent les dégâts du réchauffement climatique ont, du moins sur le papier, eu gain de cause lors de la 27e Conférence internationale sur le climat (COP 27) qui s’est tenue à Charm El-Cheïkh en Égypte en décrochant un engagement des pays riches portant création d’un fonds pour aider les pays « fragiles » à faire face au dérèglement climatique causé par les pays industrialisés.
Il faut rappeler, que l’enjeu de la rencontre de Charm El-Cheikh était pour l’Afrique, et les pays vulnérables, de franchir un nouveau cap dans la mobilisation de l’investissement initial en capital dont elle a besoin pour améliorer sa réponse face au changement climatique, à long terme. Comme souhaité par les pays sous-développés, les pays riches, premiers responsables du dérèglement climatique, ont accepté de créer un nouveau fonds dédié aux réparations des pertes et dommages, expression qui désigne les dégâts irréversibles causés par le réchauffement dans les pays « particulièrement vulnérables ». Un nouveau fonds, alors que les 100 milliards de dollars par an promis, en 2009, par les pays riches pour aider à couvrir les coûts d’adaptation et de transition des pays en développement, n’ont jamais été honorés. Cette promesse subira-t-elle le même sort que celle de 2009 ? Probable, sachant que cette nouvelle édition de la COP, intervient dans un contexte, plus compliqué qu’en 2009, marqué, essentiellement, par la guerre en Ukraine, la crise énergétique, l’inflation, et la crise alimentaire, alors que le monde revenait à peine de la crise sanitaire Covid-19 qui, avait paralysé tous les secteurs d’activités à travers le monde. De quoi s’inquiéter sur les futurs fonds à débloquer !
Des décisions plutôt mitigées
Outre cet engagement, en attendant, bien sûr, sa traduction sur le terrain, les délégations présentes à la 27e édition de la conférence annuelle des Nations unies sur le climat, COP27, signataires d’un accord définitif sur le climat, se sont également entendues sur une réduction « rapide » des émissions. Les résultats restent ainsi mitigés puisqu’elle n’a pu avancer sur d’autres questions très importantes à l’instar des causes du réchauffement climatique, l’élimination progressive des combustibles fossiles ou la nécessité de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.
Dans la nuit de vendredi à samedi, la COP 27 avait joué les prolongations pour tenter de débloquer l’impasse autour du financement par les pays riches des dégâts climatiques déjà subis par les plus pauvres. Si ce dossier épineux, a été résolu, suite à des négociations serrées, les discussions butaient sur d’autres dossiers, comme la réduction des émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement ou le sort des énergies fossiles pour enfin sortir avec les engagements de faire vite. Mais le texte final ne fait aucune mention de l’élimination progressive des combustibles fossiles, alors qu’il est, juste, souligné, dans le même texte, le besoin urgent de réductions immédiates, profondes, rapides et soutenues des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Les observateurs restent sceptiques et avertissent
Pour les observateurs, il s’agit un simple copié-collé du Pacte écossais de Glasgow. Mardi dernier, la militante ougandaise pour le climat, Vanessa Nakate, a fustigé les dirigeants mondiaux qui persistent à soutenir de nouveaux projets d’exploitation de combustibles fossiles malgré les avertissements de la science selon lesquels cela fera grimper les températures de la planète à des niveaux dangereux.
Les pays ont convenu, dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat de 2015, de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius d’ici la fin du siècle si possible. Mais les scientifiques affirment qu’avec un réchauffement d’environ 1,2 Celsius déjà atteint, cet objectif risque d’être manqué. « Pour de nombreux dirigeants, il s’agit de conclure des accords avec les lobbyistes des combustibles fossiles, de survivre au prochain cycle électoral et d’engranger le plus de profits possibles à court terme », a déclaré Vanessa Nakate lors d’un événement organisé en marge des négociations des Nations unies sur le climat à Charm el-Cheïkh, en Égypte.
En avril 2022, le Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, a publié un troisième volet concernant les solutions à mettre en place pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Si les rédacteurs du rapport reconnaissent des efforts réalisés pour réduire les émissions de CO2, ils dénoncent, toutefois, une inadéquation des moyens mis en œuvre face à la rapidité des changements, signe d’un « manque de volonté politique » avec, pour exemple, le non-respect des engagements de Glasgow 2021 lors de la COP 26 en matière de doublement des budgets pour lutter contre le réchauffement.
Le rapport en question consacre sa 1ére partie aux effets actuels du réchauffement climatique (+1,09°C en 2021) sur les populations et les écosystèmes. Un rapport plutôt alarmant à plus d’un titre puisqu’il évoque une réduction de la disponibilité des ressources en eau et en nourriture (en Afrique, en Asie et dans les petites îles notamment) ; des impacts sur la santé dans toutes les régions du monde (plus grande mortalité, émergence de nouvelles maladies, développement du choléra), augmentation du stress thermique, dégradation de la qualité de l’air… ; et la baisse de moitié des aires de répartition des espèces animales et végétales. Ce groupe d’expert met en garde des solutions de court terme inadaptées (mise en place de digues sur le littoral…), évoquant des incidences à venir pour les populations avec, en particulier, 1 milliard d’habitants des régions côtières menacés en 2050.
Guterres salue la décision
Reste que, le SG de l’ONU a salué la décision de création de ces fonds, estimant que c’est un pas important vers la justice car les pays les plus vulnérables sont ceux qui ont contribué le moins aux changements climatiques. « De toute évidence cela ne suffit pas, mais c’est un signal politique indispensable pour raviver la confiance perdue », a-t-il affirmé, en assurant que l’ONU soutiendrait ‘l’effort à chaque étape du processus’.
« Nous devons réduire drastiquement les émissions maintenant et c’est un problème que la Cop27 n’a pas abordé », a-t-il regretté avant d’affirmer que « le monde doit faire un pas de géant sur l’ambition climatique et mettre fin à sa dépendance des combustibles fossiles en investissant massivement dans les énergies renouvelables ».
La responsabilité des grands pollueurs
Au rythme de développement actuel, le réchauffement climatique pourrait atteindre 2,7°C à la fin du siècle. La Chine, avec près de 10 milliards de tonnes de CO2 émises en moyenne chaque année, détient le triste record de pays le plus pollueur au monde, devant les États-Unis et l’Inde, selon les études régulièrement menées pour mesurer le taux de pollution des différents pays. En Europe, l’Allemagne est de loin le plus grand pollueur en raison de sa grande dépendance au charbon. La France représente « seulement » 1 % des émissions mondiales de CO2. Car l’énergie nucléaire est aujourd’hui majoritairement utilisée sur le territoire. Cette source d’énergie émet très peu de CO2. Il faut noter que le taux de pollution d’un pays se mesure essentiellement par la quantité de CO2 émise par celui-ci. Les indices d’un règlement climatique à travers le monde sont patents, ces dernières années marqués par des inondations par régions, alors que d’autres sont frappées de sècheresse. Des hausses de températures même en hiver. Montée des eaux de mer qui risquent de submerger des villes entières, baisse de la production agraire en raison du dérèglement climatique… Et les coûts de ces évènements extrêmes s’envolent également.
Selon la Banque mondiale, le coût des inondations qui ont laissé un tiers du territoire pakistanais sous l’eau pendant des semaines et fait des millions de sinistrés, s’estiment à 30 milliards de dollars. La prochaine COP devra avoir lieu en 2023 aux Émirats arabes unis.
Brahim Oubellil