La grande salle du Palais des Nations, qui a abrité, hier, au premier jour de la rencontre entre les membres du gouvernement et les walis, s’est finalement avérée exiguë pour contenir tout ce beau monde convié à prendre part à ce rendez-vous annuel. Étaient présents en haut du podium le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad et le chef d’état-major de l’ANP, Saïd Chanegriha. Dans le lot figurent, outre les membres de l’Exécutif et des walis, des chefs de daïra et des présidents d’APC, des cadres de l’État et responsables d’Institutions publiques.
C’est le ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud, qui a donné l’allocution d’ouverture des travaux de cette rencontre. « Cette rencontre est une occasion aux membres du gouvernement comme aux walis d’échanger les points de vue, de se concerter et de s’écouter mutuellement pour trouver ensemble les solutions aux problèmes dans lesquels se débat le citoyen algérien », a-t-il déclaré d’emblée.
Après cette brève intervention, le président, Abdelmadjid Tebboune, a pris la parole pour évoquer l’objet de la rencontre en s’adressant directement aux walis, comme pour interpeller leur responsabilité, dont la réussite du programme du chef de l’État dépend en grande partie de la volonté de ces commis d’État.
« Un changement radical selon la volonté du Hirak »
Dans un clin d’œil adressé au mouvement populaire et citoyen, qui a bouclé une année de protestations, le Président a affirmé que le Hirak pacifique traduit « la volonté du peuple qui a pris son élan, en décembre dernier, pour une élection transparente et intègre». Sur ce, Tebboune a réitéré son engagement pour un changement « radical suivant la volonté populaire. « Il y a de cela une année, les citoyens et citoyennes sont sortis dans un Hirak béni, pacifique, sous la protection de l’ANP, digne héritière de l’ALN, pour revendiquer le changement et rejeter, pacifiquement, l’aventure qui a failli conduire à l’effondrement de l’État national et de ses piliers pour retomber dans la tragédie vécue lors des années 90 ». Le Président dira ensuite : « Telle a été la volonté, invincible, du peuple, car émanant de la volonté d’Allah».
«RestaureR la confiance perdue avec LES citoyens »
«Les walis doivent restaurer la confiance perdue avec le citoyen, et sont donc astreints à l’obligation du changement local », a lancé l’élu aux destinées du pays à l’adresse des premiers magistrats des wilayas. « Soyez au plus proche du citoyen, écoutez les élus locaux et la société civile car il faut assurer une vie digne au citoyen », a ordonné le président Tebboune.
Le chef de l’État a également sommé les walis de «renforcer les sorties sur le terrain, de réorienter les dépenses locales et d’assurer en permanence le suivi des projets à travers un contrôle technique sain, loin de toute forme de gaspillage, y compris lors de leurs déplacements et mettre fin à la politique de l’allégeance pour s’orienter vers la compétence et le mérite, dans les recrutements comme dans les attributions des marchés ».
Agir loin de tout populisme
« On doit agir loin de tout populisme et se contenter de ce qu’on est en mesure de réaliser, au lieu de promettre ce qui n’est pas à notre portée. Car le peuple va juger sur le concret », a encore déclaré M.Tebboune lors de cette rencontre de deux jours. Le Président a invité par ailleurs, l’assistance à suivre une projection réalisée sur les régions reculées où les populations ont été livrées à elles-mêmes et délaissées par les pouvoirs successifs à la tête de l’État. Routes délabrées, salles de soins dépourvues de tous moyens, eaux usées à ciel ouvert, écoles sans chauffage où les enfants grelotent tels des feuilles d’arbres, absence de cantines, ni ramassages scolaires… telle est la triste réalité du quotidien de ces bambins dans un pays aussi riche que le nôtre.
Combattre sévèrement la corruption
À la deuxième partie de son intervention, le chef de l’État est revenu sur le fléau de la corruption qui a gangréné tous les secteurs. « Il est inconcevable qu’une poignée de personnes tripote sur des milliards, alors que le reste du peuple est livré à la misère. Il est donc impératif de combattre sévèrement la corruption », a enchaîné le président Tebboune, avant d’appeler les Walis à agir sans complaisance contre ce phénomène, précisant que nul n’est en dessus de la Loi et de la Justice, et l’intérêt du citoyen passe avant toutes autres considérations.
Concernant le développement local, objet même de cette rencontre, M. Tebboune a levé le voile sur les capacités financières de l’État pour mener à bout le programme présidentiel traduit dans le Plan d’action du gouvernement. « L’argent est disponible pour le financement du Plan d’action de l’Exécutif », a assuré, à ce sujet, le président de la République, qui a insisté sur le développement local et de proximité pour permettre une vie décente au citoyen algérien sur les quatre coins du pays.
100 milliards de DA pour les communes
«L’État va injecter cent (100) milliards de dinars dans les caisses des collectives locales en mai prochain », a annoncé le président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
« Il n’est pas attendu des walis de faire de nos villages, de nos campagnes, ou de nos zones rurales des villes proprement dites. Mais juste de faire en sorte à ce que leurs préoccupations soient prises en charge à travers un partage équitable des richesses du pays car on n’accepte pas la situation actuelle », a tranché net le président Tebboune en direction de ses invités. S’agissant de la crise du Logement, le chef de l’État s’est étonné du fait qu’un million de logements ont été livrés mais la crise persiste toujours et avec acuité. Cet état de fait trouve son explication, selon le Président, dans le manque de transparence dans l’établissement des listes des bénéficiaires où des personnes se sont offertes plusieurs logements alors que d’autres n’ont bénéficié d’aucun d’où l’établissement d’un fichier national contre la « fraude » dans ce domaine.
« Aucun obstacle à la révision de la Constitution… »
M. Tebboune a évoqué en outre le projet de l’amendement de la Constitution. «Aucun obstacle à la révision de la Constitution, sauf l’unité et les constantes nationales», a souligné le chef de l’État.
«La nouvelle Constitution doit aussi être consensuelle et pour ce faire, il est nécessaire que toutes les recommandations soient examinées et prises en comptes », a recommandé le président Tebboune, affirmant que le principe de la séparation des pouvoirs sera consacrée pour éviter au pays de tomber dans une gestion otage d’une seule personne.
Il a annoncé, par ailleurs, la création d’une Cour constitutionnelle chargée de statuer sur les litiges entre les Institutions de l’État, comme pour, également, arbitrer entre les trois pouvoirs (Exécutif, Judiciaire et Législatif).
Brahim Oubellil