Avec onze nominations recueillies lundi au total, le film «Joker» de Todd Phillips, avec Joaquin Phoenix dans le rôle-titre, part en tête de la course d’une 92e édition des Oscars très blanche et masculine, qui devrait cette année encore être critiquée pour son manque de diversité.
«Joker» est en lice dans les catégories du meilleur film, meilleur acteur, meilleur réalisateur, meilleur scénario adapté et de nombreuses catégories techniques. Il est au coude à coude avec trois autres favoris, «The Irishman», thriller politico-mafieux de Martin Scorsese, «Once Upon a Time… in Hollywood» de Quentin Tarantino, et «1917» de Sam Mendes, avec dix nominations chacun.
Leonardo DiCaprio et Brad Pitt défendront notamment les couleurs de «Once Upon a Time… in Hollywood», ode de Tarantino au cinéma et au Los Angeles des années 1960, tandis que «1917», film sur la Première Guerre mondiale quasiment construit comme un plan-séquence long de deux heures, fait fort dans les catégories purement cinématographiques et techniques.
Camouflet notable de l’Académie américaine des arts et sciences du cinéma, qui remet les prestigieuses statuettes: déjà snobé lors des derniers Golden Globes, le vétéran Robert De Niro n’a pas été retenu. A charge pour ses complices Al Pacino et Joe Pesci de représenter «The Irishman» dans la catégorie du meilleur second rôle masculin.
L’Académie des Oscars a en revanche fait une place remarquée à «Parasite», de Bong Joon-ho. Palme d’or du dernier festival de Cannes, le film sud-coréen a décroché six nominations, notamment dans la catégorie phare du meilleur film, celle du meilleur film étranger et celle du meilleur réalisateur. Parmi les autres outsiders figurent «Marriage Story» (six nominations), avec son duo d’acteurs en vue Adam Driver et Scarlett Johansson, tous deux sélectionnés, «Jojo Rabbit» (six nominations) et «Les Filles du Docteur March» de Greta Gerwig. Cette dernière n’a toutefois pas été retenue dans la catégorie des réalisateurs, dont les femmes sont absentes cette année, ce qui va à coup sûr susciter la controverse à Hollywood.
Cinq femmes
«Malheureusement, il n’y a que cinq noms» dans la catégorie du meilleur réalisateur «sur une année incroyablement dense», avait déclaré à l’AFP un membre de l’Académie, sous couvert d’anonymat, avant les nominations.
Les statistiques sont cependant têtues. Depuis la création des Oscars, seules cinq femmes ont obtenu une nomination en tant que réalisatrices: Lina Wertmüller (en 1976 pour «Pasqualino»), Jane Campion (en 1993 pour «La Leçon de piano»), Sofia Coppola (en 2003 pour «Lost in Translation»), Kathryn Bigelow (en 2009 pour «Démineurs») et Greta Gerwig (en 2017 pour «Lady Bird»).
Régulièrement étrillée ces dernières années pour son manque de diversité, l’Académie des Oscars s’expose encore à la critique pour sa sélection 2020: l’actrice noire américaine Cynthia Erivo est la seule artiste «non blanche» à s’être frayée un chemin dans les nominations, dans la catégorie «meilleure actrice» pour «Harriet», film historique sur le racisme et l’esclavage aux états-Unis.
L’an dernier, trois des quatre Oscars décernés aux comédiens étaient allés à des artistes «non Blancs», relevaient des commentateurs à Hollywood, pointant notamment cette année du doigt l’absence d’Eddie Murphy, qui effectuait son grand retour au cinéma dans «Dolemite Is My Name», et de Jennifer Lopez, qui pouvait prétendre à une nomination pour «Queens».
L’ancien président américain Barack Obama s’est tout de même réjoui d’une nomination, celle du documentaire qu’il a contribué à produire, «American Factory», la difficile reprise d’une usine automobile de l’Ohio par un milliardaire chinois et le choc culturel qui s’ensuit.
«C’est le genre d’histoire que nous ne voyons pas assez et c’est exactement ce que Michelle et moi espérons faire avec Higher Ground», la maison de production fondée par le couple Obama, a-t-il écrit sur Twitter. Les Oscars 2020 seront remis à Hollywood le 9 février.