À l’instant où des militants du mouvement populaire et pacifique s’attendaient à des mesures d’apaisement après la main tendue du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, qui a invité le Hirak au dialogue, en vue de sortir de la crise, les signaux qui parviennent des cours de justice sont pour le moins difficiles à décrypter. Et pour cause, alors que des manifestants du Mouvement ont bénéficié d’une réduction de peine dans des procès en appel, et ont pu retrouver leur liberté, d’autres s’apprêtent à être jugés dès aujourd’hui.
C’est le cas notamment à Tlemcen, où seront jugés aujourd’hui 34 manifestants, dont quatre femmes, pour incitation à attroupement non armé. Arrêtés le vendredi 13 décembre dernier, soit au lendemain des élections présidentielles du 12 décembre, ces manifestants avaient été présentés au procureur de la République le 16 décembre, où ils ont été remis en liberté avec convocation directe au procès. En parallèle, et au niveau d’Alger, les deux détenus Karim Boutata et Ahcene Kadi, seront auditionnés dans le fond, au niveau du tribunal de Sidi M’hamed, aujourd’hui à 10h, tandis qu’au niveau du tribunal de Dar El- Beïda, un autre manifestant entendra son verdict. Prénommé Bourezg Khalifa, celui-ci a été jugé le 8 décembre dernier pour avoir distribué des tracts de nature à nuire à l’intérêt national, et ce en vertu de l’article 96 du Code pénal. Le verdict du manifestant Djilali Loudahi, poursuivi pour atteinte à l’unité nationale pour avoir brandi l’emblème amazigh, sera également rendu aujourd’hui par le Tribunal de Rouiba. Le procureur de la République avait requis, lors du procès tenu le 5 décembre dernier, une peine de 6 mois de prison ferme et une amende de 50 000 DA.
À Skikda, le procès des activistes Samir Leftissi, Mesbah Mohamed Amine, Boussenane Ryad, Yasser Benlazreg et Djamel Mensour, est prévu pour aujourd’hui. Ces derniers sont tous poursuivis pour attroupement non armé. Toujours sur le front judiciaire, Mohamed Amine Benalia, étudiant à Biskra, qui a été convoqué, jeudi dernier, par la police puis placé en garde à vue, sera lui aussi présenté devant le procureur aujourd’hui. Les avocats n’ont toujours pas révélé les raisons de l’arrestation de cet étudiant. Avec l’accélération des procès et des auditions des manifestants, il n’en demeure pas moins de relever que de nombreux manifestants ont pu sortir de prison après que la Cour d’Alger ait réduit leur peine lors du procès en appel. C’est le cas notamment du jeune Smaïl Chebili qui pourra retrouver, dès aujourd’hui, sa liberté.
La demande de libération de Samir Belarbi examinée aujourd’hui
Il convient de noter, de surcroît, que la Cour d’Alger examinera aujourd’hui la demande de remise en liberté provisoire du militant Samir Belarbi, après son report le 25 décembre dernier. Le militant a été, rappelons-le, placé en détention provisoire le 17 septembre dernier, par le tribunal de Bir Mourad Raïs. Il est poursuivi pour des publications portant atteinte à l’unité et la sécurité nationale », et « atteinte à corps constitué ». L’accélération de la programmation des auditions et études de dossiers des détenus d’opinion est prise avec prudence par les avocats qui n’hésitent pas à dénoncer la poursuite des arrestations. « Je préfère attendre les prochains jours pour pouvoir lire plus clair dans ces décisions des juridictions », a affirmé un avocat, membre du Comité national pour la libération des détenus d’opinion. Depuis quelques jours, la question de la libération des détenus d’opinion a fait susciter moult interrogations, notamment, après l’annonce du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, de son intention d’amorcer un dialogue avec le mouvement populaire et pacifique. Un dialogue, d’ores et déjà, conditionné par la question de la libération des détenus, de la part de nombreux acteurs de la classe politique et activistes du Hirak.
Lamia Boufassa