Face à la crise politique dans le pays suite à la mobilisation citoyenne des Algériens, le MSP a dévoilé son plan de sortie de crise, à savoir une période de transition ne dépassant pas les six mois, un Présidium dirigé par une seule personnalité, ou encore un gouvernement consensuel pour gérer les affaires courantes. Cela s’apparente une tentative de s’imposer sur la scène politique pour faire passer le projet islamiste version Makri ! Samedi dernier, le MSP s’est d’abord réuni avec les autres formations et personnalités de l’opposition chez le FJD d’Abdellah Djaballah, pour ressortir avec une feuille de route demandant « l’institution d’une courte période de transition au cours de laquelle les prérogatives du Président sortant seront transmises à une instance présidentielle composée de personnalités nationales connues pour leur crédibilité, probité et compétence ». Réunis, lundi dernier, en session ordinaire du Bureau national, les responsables du MSP mettent aujourd’hui sur la table leur propre proposition intitulée : «la vision de Mouvement pour la société de la paix pour une transition en douceur». «Il ne fait aucun doute que le vide constitutionnel provoqué par le report des élections sans prendre des alternatives politiques légales et consensuelles, mènera à la vacance du poste de Président le 29 avril 2019. Cela pourrait avoir des conséquences graves sur la stabilité du pays», a écrit de président du MSP, Abderrezak Makri, comme introduction à ce document. En assistant au conclave de l’opposition et ensuite en lançant sa propre initiative de sortie de crise, l’on s’interroge sur la vraie position de cette formation islamiste qui a toujours voulu se distinguer des autres, lorsqu’encore elle ne joue pas les trublions. Il n’y a qu’à voir les desseins du MSP quant à ses tentatives qui visent à court-circuiter la rue ou à récupérer le mouvement de mobilisation citoyenne. Ce qui relève d’un secret de Polichinelle ! Ainsi, le MSP préconise huit propositions «à mettre en œuvre» dès le 29 avril pour éviter un « vide constitutionnel ». Et comme seul préalable à cette feuille de route: le retrait du président Bouteflika avant le 28 avril 2019, sinon la proclamation de sa démission du poste de chef de l’État. Le MSP soutient aussi une poursuite de la mobilisation citoyenne jusqu’à ce que les revendications des Algériens se réalisent, à savoir «concrétiser la volonté populaire dans le choix des dirigeants et aussi mettre fin à leur mandat afin de ne pas contourner les demandes du peuple». Maintenir le caractère pacifique du mouvement et l’épargner des «luttes idéologiques et partisanes et des conflits des clans au pouvoir ». C’est en réalité ce qu’a proposé la feuille de route des partis de l’opposition, samedi dernier, mais le MSP à cette habitude de s’attribuer les gloires de ce qui est attribué à d’autres. Les islamistes proposent aussi l’accompagnement de la période de transition par l’institution militaire pour « garantir tout accord entre les politiques et les activistes du mouvement populaire ». Ainsi, on ne peut pas ne pas faire le parallèle avec la sortie tonitruante du chef d’État-major de l’ANP, Gaïd Salah, qui préconise une solution à la crise politique qui passerait par l’application de l’article 102 de la Constitution. Sur la durée de la période de transition, le MSP veut la limiter à six mois maximum. Mise en cause depuis l’annonce du report des présidentielles, une période de transition d’une année maximum fait même douter aujourd’hui les partis de l’allégeance. Beaucoup de constitutionalistes considèrent que cette période peut même dépasser deux ans. Autre proposition : choisir une personnalité politique consensuelle, non partisane et dont l’implication dans des affaires de corruption ou dans la fraude électorale n’a été prouvée à aucun moment, et aussi qu’elle soit acceptable par le mouvement populaire pour le poste de président de la République. Ce dernier aura des prérogatives limitées et préalablement définies, comme s’assurer des relations avec l’institution militaire et gérer les Affaires étrangères selon les revendications du mouvement populaire, instituer une commission indépendante pour organiser les élections, lancer une commission pour amender la loi sur les partis politiques et aussi désigner de nouvelles personnalités au sein du Conseil national de la magistrature. Le MSP préconise aussi de «ne pas refaire l’expérience du Haut-conseil de l’État» en mettant à sa tête une seule personne «qui se rendra comptable, seule, devant le peuple algérien». Enfin, le choix d’un Premier ministre par voie de consensus, qui devra, à son tour, « choisir les membres de son gouvernement parmi des personnalités, loin de toute considération partisane ou idéologique» et ce aussi en concertation avec la classe politique. Le gouvernement de transition aura à gérer les affaires courantes et s’abstiendra de prendre toutes mesures touchant aux richesses du pays et les grandes questions économiques.
Hamid Mecheri