Malgré le départ du dernier des « B » réclamé par les manifestants – le désormais ex-Premier-ministre Nourredine Bedoui – et la main tendue par le Président pour entamer un dialogue sérieux, un pas soutenu la semaine dernière par la libération de plusieurs détenus d’opinion, le Mouvement populaire ne montre aucun signe de fléchissement.
Hier, 45ème acte du Hirak : la mobilisation a été présente partout; Jijel, Bordj Bou Arreridj, Sétif, Tizi Ouzou, Constantine et autres grandes villes. À Alger, cœur du Hirak, la marche hebdomadaire a commencé un petit peu tard par rapport aux précédents vendredis. Vers 12H30, les manifestants commencent à affluer et se rassembler au boulevard Didouche Mourad pour descendre à la place Audin et la Grande poste, avant d’être rejoints une demi-heure après par les fidèles qui ont accompli la grande prière de vendredi à la mosquée limitrophe d’Errahma.
Le dispositif sécuritaire a été fortement renforcé alors que des informations – non encore confirmées – faisaient état de nombreuses arrestations de manifestants. « Dawla Madania Machi 3askaria », (État civil et non pas militaire), un slogan qui a longtemps retenti pendant tout le parcours de la marche. La journée d’hier coïncidait avec la commémoration de 62ème anniversaire de la disparition du leader de la Révolution Abane Ramdane, l’homme qui avait introduit le principe de « la primauté du civil sur le militaire et de l’intérieur sur l’extérieur » lors du Congrès de la Soummam. Les manifestants lui ont rendu un hommage en criant : « Abane Ramdane, Rabi yerrahmou » et « Allah Akbar, Abane Ramdane ».
Une semaine après que le nouveau président, Abdelmadjid Tebboune, ait pris officiellement ses fonctions, les Hirakistes refusent toujours les résultats de la présidentielle du 12 décembre dernier. « Makach Echar3ia !», (il n’y a pas de légitimité !), ont crié à gorge déployée les manifestants avec aussi les slogans classiques : « Istiklal! », (indépendance !), « Djazaïr Horra Demokratia ! », (l’Algérie libre et démocratique !).
L’offre d’un « dialogue sérieux » annoncée par le président Tebboune n’a pas encore réussi à séduire le Hirak. Les manifestants ont chanté : « Nakamlou Fiha Ghir B Silmya we Nahou Tebboune Mel Mouradia !», Les manifestants ont dénoncé aussi des « tentatives de division » : « Habine Igassmouna ! », se sont-ils indignés. Ils ont réitéré également leur principale revendication quand à la libération des détenus d’opinion : « Attalgou Lmassajine», (Libérez les détenus!). Les manifestants ont exprimé notamment leurs colère contre la marginalisation de leur mouvement par les médias – notamment les chaînes TV – et dénoncé « un black-out médiatique honteux ». Vers 15H, les rues ne désemplissent toujours pas: des processions humaines affluent toujours des quartiers de Mohamed Belouazdad, Bab El Oued et la Casbah. Le Hirak n’a apparemment toujours pas dit son dernier mot.
Hamid Mecheri
