À Alger, comme à Constantine, Jijel, Bouira, Tizi-Ouzou, Béjaïa et Oran, des milliers de manifestants ont défilé hier dans la rue, malgré les annonces du nouveau président, Abdelmadjid Tebboune, qui a tendu la main au Hirak en vue d’entamer un dialogue politique de sortie de crise. Nouveauté de ce 44ème acte du Mouvement populaire, des manifestants qui sont venus de loin ainsi que des personnalités nationales et chefs de partis, comme l’avocat Mustapha Bouchachi, Ali Laskri du FFS et des dirigeants du RCD, qui ont choisi de manifester à Oran en signe de solidarité avec les marcheurs ciblés, vendredi dernier, par une répression policière, et à laquelle la DGSN a réagi aussi bien pour dénoncer une «manipulation» qu’annoncer l’ouverture d’une enquête. À Alger, lieu des principaux rassemblements, les manifestants ont abordé les questions des détenus d’opinion et les blessés du Hirak, pour justifier leur détermination à aller jusqu’au bout pour «une Algérie nouvelle ». L’investiture officielle de Tebboune comme le nouveau président élu de l’Algérie et le départ de « dernier B », à savoir le Premier-ministre, Nourredine Bedoui, mais aussi le limogeage dans le même temps de son ministre de l’Intérieur controversé, Salah Eddine Dahmoune, n’ont pas persuadé le Hirak de la nécessité d’aller au dialogue. À l’unisson, les marcheurs ont affirmé que la question des détenus d’opinion est une question centrale de leurs revendications, sans laquelle il ne pourrait y avoir de négociations sur une sortie de crise qui dure depuis plus de neuf mois. « Makach Hiwar hatta Tatalku Al Ahrar! », (Pas de dialogue, jusqu’à la libération des détenus), « Allah Akbar, Harirou Al Mo3tak9aline ! », (Dieu est grand! Libérez les détenus !), ont scandé les milliers de manifestants durant l’itinéraire de la manifestation. Les premiers groupes de manifestants ont commencé dès 11H à affluer des quartiers limitrophes vers le boulevard Didouche Mourad et de descendre à la Grand Poste. Au devant d’une procession humaine issue de la Casbah et de Bab El Oued, une grande pancarte est déployée, sur laquelle on pouvait lire en caractères gras : « Pas de négociations !» La présence des forces de sécurité a été très renforcée, mais aucun incident ou interpellation n’ont été signalés. Les manifestants ont dénoncé également les personnalités, se définissant prétendument représentants du Hirak, qui se sont dites «prêtes à répondre au dialogue» du nouveau Président. Déambulant dans plusieurs quartiers d’Alger-Centre, les manifestants ont crié : « S’hab Al Hiwar Maymathlounach ! », (Les adeptes de dialogue ne nous représentent pas !) « Ceux qui parlent au nom du Hirak sont des faux. Les revendications du Hirak sont connues et claires. Nous ne voulons d’aucun parti ou organisation de venir parler en notre nom », peste un manifestant. Près de lui, un autre abonde : «Tebboune n’a pas répondu à notre revendication principale, c’est-à-dire la libération sans condition de tous les détenus. Comment voulez-vous donc qu’on aille négocier ? ». Un message relayé que beaucoup d’autres panifestants partagent.
Hamid Mecheri