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«Yomeddine» : La tendre odyssée d’un lépreux en Égypte

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Tourner un film à petit budget sur un lépreux et un orphelin, en Égypte, avec des acteurs amateurs ne sachant ni lire, ni écrire… Autant de défis patiemment relevés par le trentenaire A.B. Shawky pour «Yomeddine», son tout premier film, en salles mercredi. «Le plus dur a été qu’il s’agissait de mon premier film. Je n’avais rien à apporter aux financiers et j’avais aussi des acteurs non-professionnels dont une personne lépreuse. Tout cela était difficile à surmonter en particulier dans un pays qui ne facilite pas la tâche aux films à très petit budget», a confié Shawky, au printemps sur la Croisette. Son «road movie» sur les routes d’Égypte suit les traces de Beshay, un lépreux guéri mais toujours ostracisé, et d’un gamin orphelin, surnommé Obama. Deux rôles tenus par Rady Gamal, lépreux dans la vraie vie, et Ahmed Abdelhafiz. Aucun des acteurs n’a pu faire le déplacement à Cannes, en raison de soucis administratifs. À la mort de sa femme, Beshay part à la recherche de sa famille, avec une carriole et un âne. Obama se joint à ce voyage improvisé. Sur la route, ils vont expérimenter la faim, la solitude mais aussi rencontrer des Égyptiens aussi en marge qu’eux, dont un cul de jatte au grand coeur.

Une autre Égypte
Ode aux déclassés et «feel good movie» sans prétention, «Yomeddine» («jugement dernier» en arabe) évoque simultanément «Une histoire vraie», «road movie» de David Lynch, et «Elephant Man» du même réalisateur, référence assumée lors d’une scène où Beshay crie son besoin d’être enfin vu comme un humain, et non un animal. «On s’attend souvent à ce que les films du Moyen-Orient soient imprégnés de politique et de religion», estime A.B Shawky, mais «on voulait montrer le mieux possible des gens qui essaient de s’en sortir». «Yomeddine» entend également montrer «une autre face de l’Égypte», avec un personnage principal chrétien dans un pays à majorité musulmane, et un autre nubien. Le film doit beaucoup à son acteur principal Rady Gamal, très touchant et étonnant de naturel. «Quand vous vivez dans une léproserie isolée, vous n’êtes pas habitué à ce que les gens vous regardent tout le temps et à être ensuite devant une caméra et une équipe de 60 personnes, les yeux braqués sur vous. Mais à la fin du tournage, il était la star», a confié le cinéaste. Né au Caire, A.B. Shawky avait réalisé un documentaire sur une léproserie il y a dix ans («The Colony»). «C’est une maladie si ancienne, mais en voie d’être éradiquée. Ça devrait être le cas autour de 2050. Ceux qui ont contracté la maladie avant l’arrivée des traitements dans les années 80 forment donc la dernière génération», souligne-t-il. Le jeune réalisateur a débuté en Égypte avant d’étudier à New York où il a eu comme professeur un certain Spike Lee, lui aussi en compétition à Cannes avec «Blackkklansman». Scénariste et réalisateur, il a fondé sa propre maison de production Desert Highway Pictures avec laquelle il a produit Yomeddine aux côtés de la productrice égypto-américaine Dina Emam, devenue sa femme. Auteur de documentaires, il a également été consultant pour la série «The Looming Tower» sur le 11 septembre.

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