Une exploration onirique de l`univers musical andalou dans sa variante « Senâa », est proposée par Beihdja Rahal, une des icônes algériennes de cette musique savante, dans son dernier opus intitulé « Nouba Mezdj, Raml et Raml El Maya », une belle randonnée à travers une dizaine de titres, rigoureusement soumis au regard académique, marquant ainsi, le retour de la cantatrice, après deux ans d’absence imposée par la pandémie.
Produit par la maison de disques « Ostowana », l’album d’une durée totale de 72 mn, a été conçu selon les normes de l’école Senâa, une option prise par l’artiste qui n’entend « travailler au studio que sur la Nouba », tout en s’ouvrant aux autres genres de cette musique savante lors de réceptions et diverses cérémonies qu’elle anime également. Tout comme les 27 autres albums qui ont précédé ce nouvel opus, « Nouba Mezdj, Raml et Raml El Maya », s’inscrit dans le registre de la Nouba Sanâa », ce choix, explique l’artiste, est avant tout « pédagogique », car motivé par le souci de « sauvegarde et de transmission aux futures générations de la structure de la nouba et ses contenus, un legs ancestral porteur d’un pan du patrimoine musical algérien dans toute sa grandeur et sa richesse ». Dans le respect des préceptes et des normes régissant ce genre d’expression relevé que lui ont transmis ses maîtres, Mohamed Kheznadji et Aderrezak Fekhardji notamment, les dix pièces de ce nouvel opus, déroulent les mouvements M’saddar, B’tayhi, Dardj, Insiraf et kh’lass qui composent la nouba. Annonçant d`entrée la teneur de son dernier opus aux consonances académiques, la cantatrice prélude par « Tchambar Raml El Maya », dans un ton dense et relevé par les sonorités des instruments traditionnels à cordes, suivi des pièces, « Ya qalbi khelli el hal », « Kayf an yatibou », « Kawani l’biâd », « Afdi Habiban », « Ladhali chorbou l’âchiya », « Youdarradjou dardja l’hamamet », « Min hobbi had el ghazala », « Amchi ya Rassoul », et « Rabbi ya moudjib ». Beihdja Rahal à la kouitra et à la direction artistique de son projet, s’est entourée du professionnalisme et de la virtuosité des musiciens, Nadji Hamma et Mohamed El Amine Belouni aux ouds (luths), Djamel Kebladj et Abdelhadi Boukoura aux violons altos, Rafik Sahbi au qanun, Farid Mokaddem au ney, Mansour Brahimi à la mandoline, Sofiane Bouchafa à la derbouka et Khaled Ghazi au tar. Sur le lit apaisant des variations modales et rythmiques entrainantes, Beihdja Rahal promène sa voix limpide, et fait montre de toute l’étendue de ses talents multiples, d’instrumentiste et de cantatrice, sur les différentes pièces de son album, mettant en valeur le génie créatif des maîtres de la musique andalouse qui ont écrit ces textes et composé ces airs à travers les siècles. Les sonorités relevées des instruments à cordes rappellent la noblesse du genre, alors que la beauté des airs entraînants et prolongés, suggèrent, bien que la musique andalouse soit un registre aux normes bien établies, de belles distributions harmoniques. La variation des cadences irrégulières, support au lyrisme romantique des textes, mettent en valeur leur parfaite adéquation à la beauté et l’authenticité des airs andalous, dans un album accompagné d’un petit livret sur lequel le mélomane-récepteur peut trouver les textes poétiques des chansons proposées avec leur traduction vers le Français