La population de In Salah, à Tidikelt, dans la wilaya de Tamanrasset reste intransigeante sur la question de l’exploitation du gaz de schiste, en expérimentation dans la région de Ahnet, au sud du pays. Les sorties médiatiques des membres du gouvernement, à travers lesquelles ils ont tenté de rassurer la population quant aux retombées néfastes pouvant affecter la santé humaine et l’environnement, n’ont eu aucun effet à même de faire plier la détermination des protestataires. Ainsi, une grandiose marche populaire ayant drainé plus de 6 mille manifestants a été organisée, hier, au chef-lieu de la ville de In Salah, à 700 km de Tamanrasset. Un mois après, les premières manifestations nées au lendemain de l’annonce par le gouvernement de son intention de recourir au gaz non conventionnel pour pallier au problème de la chute de la production en matière des hydrocarbures, la mobilisation semble s’inscrire dans la durée, «jusqu’à ce que l’activité d’exploration ou d’exploitation du gaz de schiste sera arrêtée », comme nous l’a fait savoir par téléphone, un citoyen ayant pris part à cette action. Tôt la matinée, les habitants de cette ville commencent à se rassembler devant le siège de la daïra de cette ville, point de démarrage de la marche. La procession humaine a battu le pavé deux heures durant, pour parcourir les ruelles du chef-lieu urbain, en scandant des slogans anti-gaz de schiste. «Samidoune, samidoune, lil ghaz el-sakhri rafidhoune», ou «Nous demeurons mobilisés contre le gaz de schiste», tonnent les marcheurs pour exprimer leur détermination devant cette question, pendant que d’autres brandissent des pancartes indiquant la même revendication. En dépit des assurances faites par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, intervenu, jeudi dernier, à la Télévision nationale, la population du sud du pays semble maintenir sa protesta, tant « les responsables du gouvernement continuent à divaguer sur la question en s’adonnant à des discours contradictoires. Certains disent que l’exploitation du gaz de schiste est inéluctable pour le pays, pendant que d’autres parlent de l’arrêt de forages de Ahnet. Qui croire ?», s’interroge Sid-Ali, au bout du fil, avant d’ajouter que «Nous n’avons plus confiance en personne, ni le gouvernement, ni certains partis politiques d’ailleurs», a-t-il dit à gorge déployée. En effet, la population de cette région est toujours dans l’appréhension quant aux méfaits que pourraient engendrer un tel projet d’autant plus que les habitations se situent pour certaines à 8 km de là et d’autres à quelque 27 km. C’est ce que nous avons appris auprès de notre interlocuteur. Outre le fait que le gouvernement intensifie ses activités en matière de communication, allant notamment dans le sens de ramener la population à accepter ce projet, les autorités locales ont tenté à leur manière d’étouffer la voix populaire. Ainsi, à la veille de cette manifestation, le wali a ordonné les institutions publiques d’ouvrir leurs portes au public. Ce qui n’a pas été le cas, puisque, hier, les manifestants ont invité tout le personnel administratif à sursoir à son activité de service public. Les commerçants ont également baissé rideau pour prêter main forte à cette action, nous indique-t-on sur place. Revenant sur les récentes déclarations de Louisa Hanoune, qui soutient l’avis du gouvernement sur cette question, Sid-Ali a dénoncé les propos de la patronne du Parti des travailleurs, «qui pourtant compte une popularité à In Salah. Désormais, ça ne serait plus le cas», a-t-il soutenu. Les manifestants semblent ne plus avoir confiance en les responsables. La dernière visite en date fut celle du patron de la police, Hamel, qui aurait promis aux protestataires de faire part de leur revendication au chef de l’État. À travers une déclaration rendue publique, la population a sommé le gouvernement de répondre à leur demande, sine qua non, la protestation continuera, a menacé un des représentants de la population. Au cours de leur entrevue avec Hamel, les délégués des manifestants lui ont signifié que la population demande non pas le developpement local, du moins pour le moment, mais que la question de l’heure est «l’arrêt du gaz de schiste», a-t-on indiqué. Au sujet d’une probable visite annoncée de Sellal, les protestants disent «ne pas être contre le principe qu’un responsable du gouvernement vienne à In Salah», seulement, ont-ils précisé, «qu’il sache que nous ne courberons pas l’échine, tant que la question n’est pas résolue». Déjà, une autre marche est prévue pour demain. Nous y reviendrons dans nos prochaines éditions.
De notre envoyé spécial Farid Guellil