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Lutte contre la violence contre les femmes : c’est la bouteille à l’encre

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La violence contre les femmes est un problème omniprésent en Algérie et qui prend des proportions alarmantes. Ce fléau touche, effectivement, toutes les classes sociales. En plus de leurs blessures physiques, les femmes victimes de violence conjugale sont également exposées au risque accru de problèmes de santé mentale, tels que la dépression et les symptômes psychotiques.
Les violences conjugales constituent une très grave et inacceptable atteinte au droit, à la liberté, à la sécurité et à la dignité humaine. Il est donc nécessaire de combattre sans relâche les violences conjugales au travers de l’adoption de dispositifs qui incriminent et sanctionnent ces violences, protègent les individus les plus vulnérables. Il est à signaler qu’entre 100 et 200 femmes sont tuées chaque année en Algérie, suite aux conséquences graves de la violence conjugale. Dans le monde, selon un rapport de 2014 de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), près de 40% des meurtres sont commis sur des femmes victimes, justement, de ces violences. D’autre part, beaucoup de pays d’Afrique ne disposent pas de lois contre la violence conjugale. En Algérie, il y avait plus de 7 000 cas signalés de violence contre les femmes en 2011. Toutefois, les experts disent que le nombre est probablement beaucoup plus élevé, car de nombreuses victimes ne signalent pas les abus. La situation est dramatique, et le phénomène ne se limite pas à une région spécifique, mais se produit à travers tout le pays. La forme la plus courante de violence subie par les femmes est globalement la violence physique, infligée par un partenaire intime. Certaines formes de violence sont perpétrées, ou tolérée, par l’État, comme le viol de guerre, la violence sexuelle et l’esclavage sexuel en période de conflit. Aussi, il faut citer la stérilisation et l’avortement forcés. D’autre part, il y a lieu d’évoquer la violence psychologique est la conduite intentionnelle de porter gravement atteinte à l’intégrité psychologique d’une personne par la contrainte ou les menaces. Aussi, la violence verbale qui est une forme de comportement émotionnellement violent impliquant l’utilisation de la langue. Ce qui peut impliquer des menaces, des injures, des critiques violentes. En outre, il existe un large consensus selon lequel les femmes sont le plus souvent victimes de formes graves de violence, et sont plus susceptibles d’être blessées par un partenaire violent. La situation peut être aggravée, si la femme est économiquement ou socialement dépendante du délinquant.

La colère des islamistes
La nécessité de renforcer le cadre juridique et l’élaboration de lois répressives pour lutter contre ce phénomène reste l’un des souhaits d’une victime de la violence dans l’anonymat. L’Algérie est, ainsi, le deuxième pays du Maghreb, après la Tunisie, à criminaliser les violences contre les femmes. Après des années de mobilisation des associations féministes, les députés ont adopté, le 5 mars 2015, une loi criminalisant la violence conjugale contre les femmes. La loi veut défendre les femmes contre les violences de leur conjoint, et préserver leurs ressources financières des convoitises de celui-ci, perçu comme le chef de famille dans les sociétés traditionnelles. D’autre part, la loi a été vivement dénoncée par les conservateurs comme une intrusion dans l’intimité du couple, contraire aux valeurs de l’islam. Ce texte stipule que quiconque porterait, volontairement, des coups à son conjoint, et en fonction des blessures, risquerait de 1 à 20 ans de prison, avec la réclusion à perpétuité en cas de décès. Un autre article stipule qu’une peine de six mois à deux ans de prison serait infligée à quiconque exercerait sur son épouse des contraintes, afin de disposer de ses biens ou de ses ressources financières. Étonnamment, ce fut l’un des débats les plus contestés et controversés. Sur les 462 députés, 284 étaient présents et 59 ont remis des procurations pour le vote de ce texte, modifiant et complétant le Code pénal. Le résultat a suscité la colère de certains des islamistes de l’Assemblée. Les députés de l’Alliance de l’Algérie verte ont boycotté la séance, jugeant ce texte contraire aux valeurs de l’islam. Les députés du parti El-Adala, de Abdallah Djaballah, ont exprimé leur refus quant à ce texte, estimant notamment que criminaliser le harcèlement dans les lieux publics aurait dû s’accompagner par des lois mettant fin au non port du voile et à la provocation vestimentaire des femmes dans les lieux publics. Ce même parti a dénoncé également que cette loi a été adoptée pour se venger de l’époux et de l’homme en général qui cherche à disloquer la famille.

La loi est contre toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes
Face à ses détracteurs, le ministre de la Justice, Tayeb Louh, a affirmé que les versets coraniques protègent l’honneur de la femme et ne permettent pas d’accepter ce phénomène de violences à son encontre. Dans ce contexte, Louh a expliqué que la loi fait partie de la stratégie de lutte contre la violence et contre toutes les formes de discrimination, à l’égard des femmes. Dans le texte, le pardon de l’épouse met fin à toute poursuite judiciaire dans les cas les moins graves, mais sont maintenues, bien qu’allégées, dans les plus graves. Amnesty International estime que cette loi est un pas en avant, mais elle a été alarmée par l’arrêt des poursuites judiciaires en cas de pardon de la victime. Fin 2014, les services de police ont signalé que les conflits familiaux venaient en tête de liste des actes de violence contre les femmes. Face à ces situations dramatiques, les victimes se confinent dans le silence pour éviter des actes honteux à leurs proches, ou à leurs propres familles. Par ailleurs, la femme algérienne subit chaque jour la violence sous toutes ses formes, et la peur du divorce reste la cause principale de son hésitation à dénoncer l’auteur de la violence. Il y a lieu d’évoquer que ce phénomène touche, aussi, les femmes instruites. Le statut juridique ainsi que le rôle public et privé des femmes est une question centrale en Algérie. La relation entre les hommes et les femmes est d’une importance politique, sociale et économique et une question d’identité nationale. Selon l’historien, Daho Djerbal, le statut subalterne des femmes peut servir d’indicateur pour toutes les autres inégalités.

Les différents types de divorce
En cas de divorce, la loi algérienne prévoit que la femme doit conserver la maison de la famille jusqu’à ce que les enfants atteignent l’âge de 18 ans. Selon le président de “SOS femmes en détresse”, les services sociaux ne répondent pas aux besoins des femmes divorcées ou célibataires, car ils se concentrent sur les femmes qui sont victimes de la violence, en termes d’accès pour les quelques structures existantes de logement. De même, selon le président de l’Afad, les femmes célibataires ne sont pas une priorité, parce qu’ils ont des droits égaux en matière d’éducation et d’emploi. Selon la même source, les femmes divorcées, qui ont la charge d’une famille, reçoivent une allocation sous forme de fonds de solidarité. Depuis février 2015, un fonds national de soutien de l’enfant a été disponible en Algérie, pour protéger les droits des mineurs et des femmes avec enfants. Ce fonds permet aux femmes divorcées avec des enfants d’obtenir une pension alimentaire au profit des enfants, en cas de défaut du débiteur. Ceci est corroboré par le directeur de projet de la Laddh, qui a déclaré que le projet de loi, relatif à ce fonds, n’a pas encore été adopté. La législation en matière de divorce nécessite des clarifications sur certaines dispositions qui risquent d’impliquer, non seulement des erreurs judiciaires, mais surtout des abus de part et d’autre, a estimé Noureddine Lamtaii, juriste et enseignant à l’École supérieure de la Magistrature. La confusion entoure certaines dispositions du Code de la famille et le manque de précision de la part du législateur fait que ces articles prêtent à interprétation, ou que les décisions de justice ne correspondent pas à la réalité, notamment en matière de divorce. Le Code de la famille cite 4 formes de divorce, à savoir la répudiation (divorce du fait de l’époux qui est traduite dans la version en français par divorce), le divorce par consentement mutuel, le divorce à la demande de l’épouse (tatliq) et le khol’â. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait, dans un message adressé à l’occasion de la Journée mondiale de la femme, ordonné au gouvernement de charger un comité ad hoc de la révision et du réaménagement des articles dudit Code, relatifs au divorce qui prêtent à interprétation, en vue d’y introduire les clarifications et précisions nécessaires. Ceci afin de combler les insuffisances et garantir la protection des droits des deux conjoints. Par conséquent, les violences contre les femmes représentent un fléau qu’il est important de dénoncer, et contre lequel il faut lutter. Par ailleurs, les parents de ces victimes ne peuvent pas ou, souvent, ne veulent pas les accueillir surtout avec des enfants. La présence des enfants est pour la femme victime un facteur aggravant des violences subies. Pour les femmes mariées, les enfants représentent un obstacle pour quitter le mari violent. Elles répugnent à priver leurs enfants d’un foyer. Et parmi les femmes divorcées, qui trouvent refuge auprès de leurs parents, beaucoup rencontrent des problèmes à la suite du décès de ces derniers. De ce fait, elles sont mises à la porte ou sont astreintes à cohabiter dans des conditions extrêmement difficiles avec leurs frères. Dans la plupart des cas, ces violences sont perpétrées dans le silence. Face à cette situation désobligeante, il relève de notre responsabilité, aussi bien individuelle que collective, de briser ce mutisme et de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour éradiquer ce fléau qui gangrène la société toute entière.
Lazreg Aounallah

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