Le 14 janvier 1965, le chanteur enregistrait une de ses premières chansons électriques. Devenue légendaire, elle a fait l’objet d’une vidéo qui anticipait l’arrivée des clips des années 1980. L’an 1965 a été une année phare dans l’histoire de la pop et du rock. Il s’agit du millésime qui a produit des classiques comme Help! des Beatles, (I Can’t Get No) Satisfaction des Rolling Stones, My Generation des Who et bien d’autres chansons immortelles. Aux États-Unis, Bob Dylan faisait, de son côté œuvre de pionnier. C’est le 14 janvier 1965 qu’il grava, dans le studio A de la Columbia, à New York, une des plus grandes chansons de son répertoire: Subterranean Homesick Blues. Quelques mois avant le chef d’œuvre Like A Rolling Stone, l’ancien emblème du folk engagé amorçait sa révolution, en parant sa musique d’une orchestration électrique. La chanson ouvre d’ailleurs la première face de l’album Bringing it All Back Home, qui scandalisa les tenants du folk académique pour lequel le natif du Minnesota avait été connu. Batterie, guitare électrique et autres faisaient leur irruption chez Dylan, signant l’acte de naissance de ce qu’on a appelé le folk-rock. Dans son ouvrage Chroniques, paru en 2004, Bob Dylan expliquait qu’il avait fait un amalgame entre le rock de Chuck Berry, la chanson de blues Too Much Monkey Business et la tradition scat des années 1940. Scandées, les paroles de la chanson annoncent presque le rap, quinze avant les premiers disques du genre. Le titre lui-même renvoie à celui du livre de Jack Kerouac, un des modèles avoués de Dylan, Subterraneans. Le texte en lui-même décrit le conflit entre l’Amérique traditionnelle et la contreculture alors émergente. Très politiques, les mots de Dylan renvoient aussi au mouvement des droits civiques de 1964, dont il a été l’un des porte-parole.
Mais c’est peut-être dans sa version filmée que la chanson est la plus célèbre. Ancêtre des vidéo-clips des années 1980, la séquence, extraite du film Don’t Look Back de Pennebaker, documentaire consacré à la tournée britannique de Bob Dylan, est une scène culte, copiée des dizaines de fois depuis. Bob Dylan, debout, chante en portant des pancartes sur lesquelles sont inscrites ses paroles. À l’arrière-plan, le poète beat Allen Ginsberg et le musicien Bob Neuwirth font une apparition. Avec son air faussement nonchalant, Bob Dylan incarne alors toute la modernité du rock’n’roll.