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DR LYÈS MERABET, À PROPOS D’UNE MENACE GRIPPALE SUPÉRIEURE À LA NORMALE : « Revenir à l’éducation sanitaire et encadrer la prescription médicale »

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À l’approche de l’hiver, le virus de la grippe circule déjà en Algérie, et afin d’entrer dans une phase pré-épidémique incontrôlable, les autorités sanitaires ont tiré la sonnette d’alarme.

En effet, la situation est de plus en plus préoccupante, depuis que des indicateurs ont présenté des risques d’épidémie de grippe prématurée, particulièrement dans l’Est du pays. Une crainte qui s’est amplifiée, notamment en raison du retard important dans la couverture de la vaccination antigrippale, sachant que la Grippe est un virus imprévisible, pouvant causer des complications chez les personnes les plus vulnérables. Un épisode qui montre clairement qu’il est plus que nécessaire de revenir à la prévention et à la sensibilisation.
C’est ce que nous a confirmé docteur Lyès Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), qui a rebondi dans cette optique. Dans ses propos, notre interlocuteur a d’emblée rappelé « la nécessité de veiller au respect des mesures barrières et les mesures de protection ». Selon lui, « ce sont les mêmes mesures que nous préconisions pour la pandémie de la Covid, parce que tout simplement c’est une infection virale comme la grippe saisonnière, et ça se transmet par les mêmes voies ». Pour le praticien, il est vital de revenir au port de bavettes et d’autres mesures préventives, afin d’éviter tout risque de transmission. « Le port de bavettes, pourquoi pas, afin d’éviter de contaminer d’autres gens autour de soi, que ce soit à la maison, au travail, dans les transports ou dans les écoles », explique-t-il. Et d’ajouter concernant ces gestes pratiqués durant la pandémie du Covid. « Le lavage des mains, l’utilisation des mouchoirs à papier à usage unique, et s’en débarrasser dans des endroits appropriés, la distanciation physique lorsqu’on peut le faire. Mais essentiellement, c’est le port de bavette et l’hygiène des mains, et éviter d’entrer en contact des gens lorsqu’on est malade, pour ne pas contaminer. Notamment quand on est confiné dans des salles fermées avec d’autres collègues qu’on peut contaminer, dans les mosquées, dans les espaces commerciaux. Il faudrait témoigner d’un certain niveau de citoyenneté afin d’éviter qu’il y ait diffusion de la contamination », avertit le Dr. Merabet.

« La prévention va permettre un gain de temps et d’argent »
Non sans aborder les contraintes, qui outre les risques de décès en eux-mêmes, d’autres inconvénients peuvent résulter de ces risques de contamination à symptômes de la Grippe. Allusions faites aux dépenses et à ce que cela va nécessiter comme mobilisation des ressources humaines, également. « C’est clair que ça va éviter la contamination autour des gens qu’on connaît dans la famille, les lieux de travail, les amis, mais d’une manière générale pour la collectivité, ça va être un gain de temps et d’argent. Parce que lorsqu’on est dix personnes malades, la dépense, elle est ce qu’elle est, mais lorsqu’on est à 100 000, à 1 million ou à 2 millions de personnes atteintes, donc l’enveloppe financière, par rapport au coût de la prise en charge, par rapport à l’absentéisme, les arrêts de travail, au niveau scolaire et universitaire. Car lorsqu’on est malade, au minimum dans les états grippaux, c’est deux à trois jours, jusqu’à une semaine d’arrêt de travail, et ça, ça retentit justement sur beaucoup d’autres situations. La prévention reste essentielle, à côté il y a la vaccination, mais elle n’est pas pour tout le monde. Ça touche les personnes âgées, à partir de 65 ans, les femmes enceintes, quel que soit l’âge de la grossesse, les gens qui ont des maladies chroniques, et les professionnels qui sont en contact direct avec les malades, ceux de la santé notamment. Donc il faudrait que toutes ces personnes soient vaccinées afin d’être protégées, non pas contre la maladie, mais ça va renforcer leur immunité, même si elles sont contaminées, ils vont prendre des formes légères et modérées de la Grippe. Pas comme d’autres gens qui pourraient faire des situations plus graves par rapport aux complications de la Grippe »

« Devant des cas assez graves, il est important de se faire vacciner »
Conscient des réelles menaces, en sa qualité de spécialiste averti de la santé, le militant syndicaliste affirme que la vaccination pour une certaine catégorie de personnes est primordiale. « Le constat est que c’est vraiment des cas sévères de grippe, la contamination, elle est très rapide. Ici au niveau du centre, on n’a pas enregistré de cas de décès dus aux complications de la grippe, mais nous avons constaté qu’i y a des cas compliqués où on a dû hospitaliser des malades, chez les enfants, chez des personnes âgées et chez des femmes enceintes, et ça, c’est vérifié au niveau de plusieurs structures de santé. Des cas assez graves, et c’est par rapport à ça qu’on est en train d’attirer l’attention et de tirer la sonnette d’alarme. Il est vraiment important de se faire vacciner, tous les gens qui sont ciblés par la vaccination, mais aussi, le plus important est là, c’est de veiller au respect des mesures barrières. Parce qu’on n’a pas cette culture, de manière générale, de se protéger et de protéger les autres lorsqu’on a des symptômes d’un état grippal ou bien d’un rhume. Lorsqu’on n’est pas contaminé, on peut mettre une bavette, surtout lorsqu’on est dans un moyen de transport, lorsqu’on est confiné. Ça permet de casser la chaîne de transmission. Chez les asiatiques c’est une culture de manière générale, chez le citoyen, notamment en Corée, au Japon et en Chine, durant la période de la diffusion des infections virales. Ils sont vraiment habitués à se protéger et protéger les autres, donc je pense que c’est ce qu’il faudrait faire », ajoute-t-il.

« Grâce à l’utilisation de la bavette, la contamination du virus grippal a régressé »
Et comme pour faire une comparaison avec la période actuelle et celle de la pandémie du Coronavirus, notamment afin de démontrer que les mesures sanitaires permettent de freiner la contamination, il ajoutera aussi que « Durant la période de la Covid, du moment que beaucoup de citoyens se protégeaient en utilisant des bavettes, nous avons constaté vraiment une nette régression de la contamination du virus de la grippe, durant la saison d’hiver et du printemps, et ça, ça démontre l’intérêt de l’utilisation des bavettes pour, pas endiguer, mais au moins diminuer l’effet de la contamination de ces infections virales chez nous. Le plus important à laisser, c’est de rappeler la nécessité de respecter les mesures barrières tant qu’on peut le faire. C’est intéressant au niveau personnel et au niveau collectif.

«La polémique entretenue durant le Covid a impacté le comportement des gens»
Pour Lyès Merabet, pour mieux comprendre les raisons qui ont poussé les gens à éviter la vaccination, c’est simple, c’est en partie à cause des préjugés sur la vaccination antérieure contre la Covid-19. « Toute la polémique qui a été entretenue autour de la vaccination contre la Covid, ce qui a vraiment impacté au niveau du comportement et la réaction des gens par rapport à la vaccination d’une manière générale, et ont fait dans l’amalgame. Donc, on est toujours dans cette approche erronée et perverse par rapport à la vaccination. Depuis la nuit des temps, la vaccination a endigué des maladies qui tuent, par centaines de milliers de gens par année. C’est grâce à la vaccination que nous avons pu maîtriser, grâce à la vaccination que les maladies infectieuses ont carrément disparu, et grâce à la vaccination que des complications responsables de certaines maladies infectieuses ont pu être maîtrisées, et c’est tant mieux. Malheureusement, cette polémique autour des vaccins a fait des dégâts, et entre autres cette atmosphère de suspicion de manière générale. Et pour corriger cela, il faudrait une communication plus agressive et plus disponible des autorités sanitaires, afin d’expliquer les bienfaits de la vaccination », dira-t-il aussi.

« Selon l’OMS, quelque 250 000 à 600 000 décès par an dans le monde »
S’appuyant sur des chiffres,  il ajoutera à titre de rappel que « Les bilans présentés par l’OMS chaque année par rapport à la grippe saisonnière, c’est autour de 250 000 à 600 000 décès par an. Ça nous renvoie à un autre aspect qui est l’aspect financier, les dépenses liées à ce problème de situation sanitaire et de santé publique, lorsqu’ils ne sont pas bien gérés, régulés et pris en charge correctement, à travers le comportement du citoyen, mais aussi à travers les démarches des entreprise sanitaires dans tel ou tel pays. Donc lorsque l’infection n’est pas maîtrisée, au lieu d’avoir des dizaines de milliers de malades, on risque d’avoir des millions de malades, et ça va impacter directement le côté financier, car il y a une prise en charge, il y a un coût, il y a une dépense ».

« La consommation abusive de médicaments va aggraver nos dépenses et diminuer nos stocks »
Enfin, pour finir, Merabet a mis l’accent sur l’usage abusif de certains médicaments, ce qui pourrait nuire à la santé, mais aussi à une éventuelle indisponibilité de certains médicaments essentiels. Et de conclure. « Actuellement, la consommation des produits pharmaceutiques qui se fait pratiquement dans plus de 80 %  des cas de grippe, ou de rhume, se fait sans ordonnance et sans prescription médicale. Le gens se présentent au niveau des officines et sont servis, on prend des antibiotiques, des anti inflammatoires, des antalgiques, et d’autres médicaments, et Dieu sait que dans la plupart des cas, ce n’est pas justifié, c’est une dépense qui va aggraver les dépenses de santé à travers une consommation accrue du médicament et qui ne serait pas nécessaire, et ça va diminuer nos stocks de médicaments essentiels qui seraient utiles d’être prescrits pour d’autres problèmes de santé, pour d’autres maladies. Donc c’est une situation qu’il faudrait prendre sur plusieurs actes, et la sensibilisation de la situation sanitaire est importante, revenir aux mesures préventives et la vaccination contre la grippe saisonnière, c’est aussi important, et aussi, juguler le flux des malades, s’organiser en matière de prescription médicale, pour être sur un consensus thérapeutique, en limitant les médicaments à prescrire dans ce genre de situation. L’antibiotique n’est pas justifié parce que c’est une infection virale »
Propos recueillis par Hamid Si Ahmed

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