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DES PERSONNALITÉS PUBLIQUES CHASSÉES ET LYNCHÉES PAR LA FOULE L’État face à «la loi du talion»

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Depuis quelques semaines, on assiste à une véritable opération «chasse à l’homme» contre d’actuels et anciens hauts cadres de l’État. C’est un comportement étrange et inédit dans l’histoire récente de l’Algérie, de surcroît en plein contexte de crise politique qui se corse de jour en jour. Si jusque-là le caractère pacifique des marches populaires et citoyennes, organisées depuis le 22 février dernier, domine en toutes circonstances, des dérives, surtout si elles venaient à faire tâche d’huile, risquent de faire basculer le mouvement dans l’inconnu. Pas loin qu’hier, en effet, le wali d’Alger a été pris à partie par une foule enragée qui s’est déchaînée derrière lui. En visite de terrain à la Basse Casbah après le spectaculaire effondrement d’un bâtiment qui a emporté cinq malheureuses vies humaines, Abdelkader Zoukh a failli être lynché. Il a été exfiltré par sa garde rapprochée avant qu’il ne soit évacué en lieu sûr. Avant-hier, Aboudjerra Soltani a eu le même sort, ou pire encore. L’exministre d’État a été chassé par des manifestants algériens en pleine action de protestation à la Place de la République. Arrosé et malmené par la foule, Soltani a passé le plus mauvais quart d’heure de sa vie. À la limite on peut siffler et huer une personnalité publique parce qu’on juge qu’elle symbolise ou qu’elle reflète l’image d’un régime politique dont on demande le départ. Mais de là à attenter à l’intégrité physique d’une personne pour justifier un acte condamnable sur le dos d’une cause citoyenne- du reste noble et légitime- amènera à remettre en cause même l’existence de l’État. D’ailleurs, on s’interroge sur le rôle de l’autorité publique dans pareilles dérives. Quel qu’il soit le délit dont se rend coupable tel ou tel responsable dans la gestion des affaires de l’État, celui-ci doit répondre de ses actes devant la Justice et non pas rendre compte de ses actes sur la place publique. À moins maintenant que l’on soit dans une situation de «non-État» et que l’on veuille supplanter l’institution judiciaire par des «tribunaux populaires», comme l’aurait souhaité le bras politique (FIS) du terrorisme dans les années 1990.Même les ministres du Gouvernement Bedoui n’ont pas échappé à la «vindicte populaire». Au moins trois ont fait l’objet d’une traque de la part de la population. Ainsi Salah Eddine Dahmoune du département de l’Intérieur, Mohamed Arkab de l’Énergie et Mustapha Kouraba des Travaux publics ont subi tour à tour les mêmes hostilités lorsqu’ils étaient en visites de travail, respectivement à Béchar, Tébessa et à Alger. Quoique le peuple réclame la tête du gouvernement actuel, s’adonner à des attaques violentes contre des ministres ne peut ni être une solution à la crise, ni honorer un engagement citoyen. Car, après tout, tout le monde est comptable devant les lois de la République. Et que dire encore des personnalités convoquées ou déférées ces jours-ci devant les tribunaux pour des affaires de corruption ou de détournement de deniers publics ? Seraient-elles livrées en toute impunité à la foule pour subir la loi du talion ? Quand bien même la colère citoyenne soit justifiée par l’impératif d’aller vers un changement radical dans le pays, tout responsable public, quelle qu’elle soit sa fonction ou son rang à l’échelle de l’État, doit être traité dans sa condition humaine avant tout. Aujourd’hui, les Algériennes et les Algériens doivent plus que jamais se démarquer de ce genre de comportements révolus et condamnables. C’est une urgence absolue en ce contexte particulier. Faute de quoi, bienvenu le chaos !

Farouk Bellali

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