Accueil MONDE Attentat en Turquie : nouveau cauchemar dans les rues d’Ankara

Attentat en Turquie : nouveau cauchemar dans les rues d’Ankara

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L’attaque qui a frappé la capitale a fait une trentaine de morts et plus d’une centaine de blessés dimanche soir. C’est la troisième en cinq mois.

Nouvelles scènes d’horreur et de chaos à Ankara dimanche soir. Une fois de plus, la capitale turque a été frappée de plein fouet par le terrorisme. En fin d’après-midi, une voiture piégée est venue se faire exploser contre un bus municipal, dans le quartier de Kizilay, au cœur de la cité anatolienne. Selon le ministre de la Santé, l’attaque a fait au moins 37 morts (des civils) et 125 blessés.
L’attaque – non revendiquée – a eu lieu dans un quartier très fréquenté de la capitale, aux abords d’un important nœud de transports en commun où se trouvent de nombreux commerces. Kizilay est également connu pour abriter de nombreux ministères et institutions turques (le Parlement, l’état-major des armées, etc.). Mais, une fois de plus, les mesures sécuritaires sur place n’auront pas suffi.
En cinq mois, c’est la troisième fois que la capitale turque est touchée par un attentat. En octobre, deux kamikazes – membres supposés de l’État islamique – se sont fait exploser au beau milieu d’une marche pour la paix. Le bilan fut tragique : 109 morts. Quatre mois après seulement, le 17 février, dans ce même quartier de Kizilay, une attaque-suicide contre un bus de l’armée a coûté la vie à 29 personnes. Une attaque dans le cœur névralgique de l’État turc, au nez et à la barbe des services de sécurité, revendiquée à l’époque par les TAK (Faucons de la liberté du Kurdistan) : un groupe dissident du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), classé sur la liste des organisations terroristes par les États-Unis et l’Union européenne.

Séparatistes kurdes
Et dimanche soir, au vu du mode opératoire, plusieurs médias et officiels turcs pointaient de nouveau du doigt les mouvements séparatistes kurdes, véritable bête noire d’Ankara. « S’il ne faut pas mettre de côté l’hypothèse de l’EI, la piste kurde est à privilégier, selon moi. Cela peut être le PKK ou le TAK», estime Soli Ozël, éditorialiste de Habertürk. Et cet expert en relations internationales à l’université Kadir-Has d’Istanbul d’ajouter : «Le timing de l’attaque de dimanche est important. L’attentat a lieu le jour même où deux nouveaux couvre-feux sur des villes kurdes sont annoncés par le gouvernement turc.» En effet, ce dimanche matin, l’exécutif turc confirmait la poursuite des opérations militaires dans le sud-est du pays, à majorité kurde.
Deux nouvelles villes, Nusaybin et Yüksekova ont ainsi été placées sous couvre-feu par les forces de sécurité turques, qui entendent déloger les rebelles du PKK, retranchés dans les zones urbaines de la région. L’attaque de dimanche pourrait être, selon certains observateurs, une action de représailles contre l’État turc.
Quant à savoir qui, du PKK ou des TAK, est derrière l’opération, la réponse importe peu, estime Soli Özel : «C’est du pareil au même.» «Les Faucons ne sont qu’un label utilisé par le PKK pour mener des attaques (contre les civils, NDLR) qui auraient des répercussions négatives en termes d’image pour le PKK.
Je ne pense pas qu’ils existent réellement», poursuit Soner Çagaptay, directeur du programme turc au Washington Institute. Des Faucons qui, au lendemain de l’attentat de février, avaient promis de continuer leurs attaques et de menacer directement les civils.

«Un nouvel échec des services»
Dimanche soir, comme après chacune des attaques terroristes ayant frappé la capitale, l’action des services de renseignements turcs était sérieusement décriée. « C’est un véritable scandale, un nouvel échec des services, lâche Soli Özel. Rien n’a été fait depuis octobre, personne n’a démissionné.» «Même les Américains s’attendaient à l’attaque.
Comment, nous, nous n’avons pas pu l’arrêter ? » s’interroge l’éditorialiste de Habertürk, qui rappelle que, le 11 mars dernier, l’ambassade américaine à Ankara avait averti ses ressortissants sur les risques d’une attaque imminente, dans la capitale, contre des bâtiments officiels turcs.
Quelques heures après cette nouvelle attaque meurtrière, la Turquie était de nouveau plongée dans le noir médiatique. Les lieux de l’attentat étaient quadrillés par la police qui en interdisait l’accès aux journalistes.
Plus tard dans la soirée, le Conseil supérieur de la radio et de la télévision turc, lui, annonçait l’interdiction de diffusion dans les médias et sur les réseaux sociaux de photos et images de l’explosion.

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